Au Maroc, une histoire de tacos en famille
Photo : Sebastian Castelier

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Au Maroc, une histoire de tacos en famille

De Marrakech à Agadir, le concept de la chaîne « Tacos de Lyon » fait recette : des sandwiches hybrides et un certain sens des affaires.

Une silhouette féminine surgit d’un escalator avant de se diriger vers nous, d’un pas assuré. On est à l’étage du centre commercial Ibn Tachfine, au cœur de Casablanca. Celle qui se cache derrière une paire de lunettes fumées, un grand manteau rouge et un nom d’emprunt, n’est autre que Fadila*, la cofondatrice de Tacos de Lyon, une jeune chaîne de restauration rapide marocaine qui cartonne depuis quelques années dans tous le pays. La spécialité de l’enseigne ? Le « French Tacos », une étrange invention culinaire hybride, à mi-chemin entre la tortilla et le shawarma.

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« Soit de la viande hachée, soit du poulet, de la salade, des tomates, du fromage, une galette… C’est bourratif, vous avez plus faim jusqu’au dîner ! » Toutes les photos sont de Sebastian Castelier.

À l’origine de cette success story familiale : le frère de Fadila. Ce dernier, qui s’est lancé dans la restauration au milieu des années 2000, a d’abord exercé le métier de boucher, en France, au moment où l’Hexagone connaît le boom des burgers américains. Un beau jour, ce passionné de cuisine transforme sa boucherie en un fast-food, dont la carte sera principalement composée de « tacos », ce nouveau sandwich qu’il a découvert et qu’il tente de populariser.

Aidé de sa mère, le soir, après la fermeture de son restau, il fait des essais, il tente des nouvelles recettes. Au « french tacos » classique, qui inclut une base de viandes et de frites, il ajoute du fromage et des mélanges de sauces, pour voir ce que ça donne. Fadila et son frère sont nés au Maroc. Lui est parti étudier en France, à l’âge de 17 ans, avec un rêve en tête : rentrer un jour au pays pour monter une affaire. « Au Maroc à cette époque, à part McDonald’s, il n’y a rien du tout ! », se souvient Fadila. Entre 2005 et 2007, « il achète un magasin de 45 mètres carrés, une mini-friteuse, un mini-toaster, quelques galettes et il tire le rideau ».

TexMex, BangBang ou encore DeliceCB, la carte de Tacos de Lyon comprend huit variétés de Tacos.

Convaincu de l’efficacité de certaines de ses recettes de tacos, le frère de Fadila – en bon alchimiste de cuisine – sélectionne les plus prometteuses et les met à la carte de son restaurant. Très vite, le bouche-à-oreille et les prix attractifs des menus attirent une clientèle de plus en plus nombreuse : « Il y a eu un vrai boum, les gens faisaient jusqu’à une demi-heure de queue pour leurs tacos », raconte Fadila .

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La composition de leurs sandwiches en galette ? « De la viande hachée ou du poulet, de la salade, des tomates, du fromage, une galette de maïs… C’est bourratif, et vous n’avez plus faim jusqu’au dîner ! ». Un second point de vente ouvre peu après et les affaires prospèrent. Aujourd’hui, il existe 25 établissements, disséminés dans plusieurs villes du Maroc comme Agadir, Marrakech ou encore Rabat, la capitale. L’enseigne Tacos de Lyon emploie environ 250 personnes à travers le pays.

Sauce algérienne, Biggy Burger ou Samouraï, la sauce est un ingrédient clef du Tacos « made in Morocco ».

Leur best-seller, toujours selon la jeune femme, c’est le TexMex : un tacos au poulet agrémenté de sauces algérienne et biggy burger. C’est lui qui constitue plus de 50 % des ventes dans les restaurants de l’enseigne. Dans le Tacos de Lyon du centre commercial Ibn Tachfine, à l’heure du déjeuner, la clientèle est hétéroclite : les familles croisent les travailleurs du coin et les étudiants au ventre creux.

Une famille marocaine déguste des tacos. « Ici, le TexMex complet sauce algérienne est parfait, même si parfois je prends la sauce Samouraï » affirme Ahan Rami, un fidèle consommateur qui vient déjeuner trois fois par semaine.

Ce jour-là, on croise Ahan Rami, un client qui vient déjeuner ici au moins trois fois par semaine. Il connaît bien la maison. Malgré toutes les enseignes de Tacos concurrentes qui ont essaimé au Maroc (on citera Tacos de France, notamment), c’est chez Tacos de Lyon où il préfère aller : « Ici, le TexMex complet sauce algérienne est vraiment parfait – même s’il m’arrive de changer pour la sauce Samouraï. » Le prix des repas joue aussi forcément : chez Tacos de Lyon, un menu coûte entre 42 dirhams (pour le « SteakHouse » et le « TexMex ») et 56 dirhams (pour le « Lyonnais » ou le « Tacossa ») – soit environ 5,50 €.

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Mais pourquoi l’enseigne porte le nom « Tacos de Lyon » si elle est basée au Maroc et fabrique des sandwichs qui ont peu de choses à voir avec les « vrais » tacos mexicains ? Quand on lui pose cette question – qu’elle a probablement déjà entendue mille fois –, Fadila laisse échapper un rire bruyant : « Et bien écoutez, c’est parce que nous sommes Français ! On a tous grandi en France. Pour mes frères, tout a commencé près de Lyon – on a un amour pour cette gastronomie. »

Scène de vie au abord d’une enseigne Tacos de Lyon dans les rues de Casablanca, capitale économique du Maroc.

Plus tard, elle reconnaîtra que le choix du nom de l’enseigne relève un peu du hasard : « Mon frère a pris un papier, un stylo – il était là en train d’essayer plein de noms, ‘burger truc’, 'burger ça’. Je rentrais dans le bureau le matin et je voyais plein de croquis, plein de tentatives de noms… Puis un jour, il a eu un feeling avec ‘Tacos de Lyon’. »

*Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressée.