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Henry Michel regarde Top Chef – Ep.7 : l'épisode impitoyable

Une lutte à mort contre Etchebest, une masterclass de Yannick Alleno sans concessions, une élimination choquante, et à la fin, c'est toujours Giacinta qui survit.

Suggestion de dressage : ce débrief est à lire comme une note de service, comme un carnet de bord qui se grignote dans l'ordre chronologique, en même temps que vous matez l'épisode de Top Chef en direct ou quand vous le re-matez en streaming. Pour voir à quoi ressemblent les candidats, vous pouvez aller faire un tour sur ce trombinoscope. Pour voir les débriefs de tous les épisodes précédents, rendez-vous ici.

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Au plus les épisodes défilent, au plus cette saison de Top Chef est le reflet de notre actualité politique : 
- un candidat relou qui refuse de partir malgré l'opprobre nationale (Giacinta)
- un candidat qui finira au deuxième tour sans avoir vraiment les moyens d'exercer, et qui fait peur à beaucoup de gens (Giacinta)
- un candidat qui rafle toutes les occases pour finir en finale sans faire grand chose selon certains (Giacinta)
- un candidat plutôt sympa qui manque de charisme et que d'autres qualifient d'idéaliste (Giacinta)
- un candidat qui parle très fort et réapparaît en hologramme à chaque épisode (Giacinta). Enfin, quelques candidats sans importance qui n'ont techniquement aucune chance de gagner (Giacinta).

Mais comme pour cette campagne, les coups de théâtres sont nombreux et haletants. Et ceux de cette saison de Top Chef sont particulièrement violents. Ils vous tombent sur la nuque bien fort, vous laissent pantois, comme vidés/désossés par un M.O.F en colère. Cet épisode ne fait pas exception, j'en ai encore le souffle court. Récapitulons.

Epreuve 1 : Cassage de pâtes par Etchebest

Ce qu'il fallait faire : un plat surprenant à base de pâtes industrielles.
Ce que j'aurais fait : j'aurais amené à table un plateau repas vide. Au bout de quelques secondes d'incompréhension, les chefs auraient remarqué que l'assiette et les couverts étaient en réalité réalisés en pâtes ! Le plateau repas lui-même en feuilles de lasagnes ! Et Stéphane Rothenberg, leur parlant depuis le début de l'émission, était en réalité un immense mannequin entièrement constitué de pâtes avec un magnétophone à l'intérieur, que j'aurais articulé depuis l'autre bout du plateau à l'aide de cordes et de poulies…en pâtes aussi ! Le tout avec une petite sauce bolognaise.

Le twist : Philippe Etchebest participe aussi à l'épreuve. Si les candidats réussissent à se placer devant le chef, ils se qualifient directement pour le prochain épisode. Mais Etchebest n'a que 45 minutes pour préparer son plat alors que les candidats en ont 90.

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Juges : Michel Roth et Dominique Toulousy. Le premier a été double étoilé Michelin à l'Espadon (le restau du Ritz pré-fermeture en 2012), Meilleur Ouvrier de France ET Bocuse d'Or en 1991. Autant dire qu'il coupe mieux les oignons que vous. Le deuxième est aujourd'hui chef en Suisse mais a conquis ses lettres de noblesse aux Jardins de l'Opera à Toulouse. Il a eu pour élève Philippe Etchebest. Il lui a appris tout ce qui a fait de lui Philippe Etchebest : bien préparer la whey, enchainer les crunchs, maîtriser les prises neutres pour renforcer les biceps. Pour l'expression orale, autant le dire de la manière la plus simple possible : messieurs Roth et Toulousy ne sont pas des bêtes de télévision. Ils ne rempliront jamais Bercy. Devant une camera, leur vocabulaire tourne autour de treize mots, c'est deux mots de moins que mon Jack Russel pour réclamer à bouffer. Ce qui prouve que les qualités d'animation télévisuelle ne présagent en rien des génies culinaires. Car ils en sont.

Michel Roth et Dominique Toulousy roulant à toute vitesse au sortir des studios. (c) Gendarmerie Mobile

Julien
Son plat : Conchiglioni terre-mer, coulis de poivron pimenté, condiment aïlé et aubergine.
- Julien farcit trois conchiglioni d'un ratatouillât de brunoises de courgettes et poivrons aïlés, cale deux-trois chips de chorizo, et un caviar d'aubergine chargé de 250 gousses d'ail. Vraiment pas convaincu par le délire. 
- Sarran le prévient de la force de son aïolade, Julien passe un peu outre, c'est dommage : Sarran a beaucoup raison depuis quelques épisodes. 
- J'accroche de moins en moins avec Julien. Le montage le montre comme un garçon un peu juvénile, dispersé, toujours décontract. C'est souvent agréable mais parfois on ne le supporte plus, comme ce collègue qui chanterait tout le temps en open space. 
L'avis du Jury : « Je pense qu'il va manquer de la pâte », « C'est plus un plat de légumes qu'un plat de pâtes », « Hou y'a de l'ail ! », « Il a pris quelque chose de tout prêt et l'a farci » (ET ENCORE C'EST PAS EN FORME DE NOIX ! n.d.a) 
-> DERNIERE PLACE pour Julien.

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BONUS MULTIMEDIA : Le record du monde de mangeage d'ail en une minute.

Guillaume
Son plat : Acidité végétale foin et foie gras.
- en vrai : pâtes diversement farcies de crème foie gras cèpes, crème noix-persil-estragon, et crème ail et foin.
- Guillaume ne déçoit jamais dans ses idées. C'est un candidat qui nous aura donné le plaisir, tout au long de top Chef, de ne jamais choisir la facilité et de toujours penser hors du cadre. Quand la réalisation est au rendez-vous, c'est toujours impressionnant. Quand elle ne l'est pas, la sanction est impitoyable. Comme venir à une soirée karaoke en amenant son propre micro en or : sur scène, pas le droit à la fausse note.
- Sarran : « Ce qu'il y a de bien avec toi c'est que je suis toujours aussi paumé.
L'avis du jury :  « On voit pas trop le rapport mais bon » (Le rapport avec quoi ?), « C'est original », « Le dressage est très joli », « Ça manque un peu de croquant, de mâche », « La pâte fait papier carton  », « Le positif, c'est les idées  ».
-> AVANT-DERNIÈRE PLACE pour Guillaume.

Pendant ces épreuves, Philippe Etchebest feint de bouillonner et d'attendre son tour à grands coups de gestes théâtraux. Ce qu'il ne sait pas, par contre, c'est qu'en coulisses, les deux cuisiniers de sa brigade Franck et Jérémie participent également à l'épreuve. Les deux champions se sont pris une grosse claque la semaine dernière, et Jérémie est passé à ça de l'élimination (je réalise un geste avec mon pouce et mon index extrêmement rapprochés).

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Franck
Son plat : pâtes rigatoni, farce d'écrevisses, purée de champignons, jus d'écrevisses, épinards
- « Je veux garder tout le jus dans la tête » (brève de backroom) 
- Un très beau jus d'écrevisse, déglacé avec une garniture aromatique, versé directement sur un petit gâteau de pâtes farcies et compactées en timbale.
L'avis du jury : chaque commentaire de Roth ou Toulousy ressemble à un titre de Christophe Maé 
- « Des pâtes, y'en a », « Sympa le jus »,  « Les pâtes sont farcies », « Cuisson bien », « C'est bon ». 
-> TROISIÈME PLACE pour Franck, qui sera dégoûté, comme ces gars au collège qui pleuraient quand ils n'avaient que 17.

Jérémie
Son plat : pâtes zitones, écrevisses, volaille et champignons. 
- Le plat est un cousin proche de celui de Franck, mais celui de Jérémie est plus technique. Il crée une sorte de socle à sa timbale pour lier ensemble ses zitones 
- une petite farce fine volaille, champignon et blanc d'oeuf qu'il va fixer à la vapeur.
- Les pâtes ont l'air tristounettes (sauf erreur elles ne sont pas farcies contrairement à celles de Franck), mais c'est parce qu'au contraire de Franck, la sauce de Jérémie est séparée, et ce sera aux chefs de verser dessus leurs jus de carcasse (enfin, le jus de carcasse des écrevisses, sinon c'est gore). 
L'avis du jury : « Ca donne envie de goûter tout de suite », « Beau dressage », « La cuisson est bonne », « C'est très bon », « C'est subtil », « C'est très très gourmand ». 
-> SECONDE PLACE pour Jérémie. Mon champion est de retour.

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Giacinta
Son plat : Spaghetti dans les sous-bois ( un nom qui fait plus « Faites entrer l'accusé » que «Top Chef »)
- En vrai, c'est un risotto de spaghetti dans du jus de viande et une espuma de parmesan et champignons.
- Afin de bien nous énerver, M6 montre en entrée de séquence l'extrait de la noix au moule volé. On est au taquet.
- La chance de Giacinta est incroyable. Pour la première fois depuis le début de Top Chef, elle ne se plaint pas du thème imposé : les pâtes. « Pour moi les pâtes, c'est une cousine du cueur ».
- « On va vous mettre la misère chef ! » crie Giacinta à l'adresse de Philippe Etchebest. Extrême moment de gêne -  c'est un peu comme si je disais « J'arrive, Thomas Pesquet ! » en sautant en l'air. 
- Giacinta fait cuire ses spaghettis en risotto, les arrosant d'un beau bouillon brun corsé, ça a l'air appétissant, mais le problème, c'est que l'épreuve nous demande de faire un plat surprenant, et Giacinta nous fait un plat de pâtes, quoi.
- « Ils vont absorbir en couisant le bouillon ».
- Le geste le plus technique de son épreuve est de faire tourner les pâtes autour de la fourchette pour les poser en tas sur l'assiette. Ce qu'un enfant sait faire en Italie dès l'âge de quatre ans. En y arrivant, Giacinta pousse un cri de joie. 
L'avis du jury : « bon, goûteux », « le parmesan prend un peu le pas sur le champignon ».
-> CINQUIÈME PLACE, ce qui est tout de même un peu décevant pour la spécialité de Giacinta (après le moulage de noix).

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BONUS MULTIMEDIA : cette recette de spaghetti par le mythique Steve Reed a été élue par les youtubeurs comme la recette de cuisine la plus triste du monde. Vous n'avez jamais vu ça de votre vie.

Maximilien
Son plat : Ravioles écrevisses, sauce écrevisse.
- Minimum syndical pour Maximilien, qui prend peut-être un petit peu le melon à force de réussir en facilité. Et le pire c'est que ça fonctionne ma foi.
- Se goure de pâte, ne se démonte pas, fait chillax des petits cannellonis à la farce fine d'écrevisse, qu'il cuit à la vapeur. Reste radin sur les doses comme s'il payait les ingrédients de sa poche.
- Hélène Darroze n'est pas particulièrement hypée par cette recette minimaliste et vapeur, on est loin du sud-ouest. L'avis du jury :  « c'est joli, c'est fin », «on aurait pu voir plus de pâtes », « al dente », « la sauce est bonne », « je trouve la farce de la pâte un peu ferme », «un peu dommage ».
-> SIXIÈME PLACE pour Maxou, et le plus triste c'est que c'est mérité. Sad !

Alexis
Son plat : Mille-feuille de pâtes forestier
- On attend beaucoup d'Alexis, qui compense souvent un manque de niaque et de préparation par un palais extraordinaire et un instinct qui peut tout dévaster.
- Là encore, il repose sur ce palais. Il lance ses préparations sans savoir ce qu'il va faire. Goûte, teste, improvise, et nous sort un mille-feuilles de pâtes parcouru de technique et de gout, sauce mornay (sorte de béchamel au fromage), tuiles de fromage, farce champignon et risotto de coquillette-lard. Ça a l'air bon cette affaire.
- Première fois qu'Alexis ne met pas de citron vert dans une recette.
- Le jury ne l'a pas mentionné mais cette recette dans ses goûts semble résonner avec l'enfance, le côté coquillette, lard, fromage.
L'avis du jury : « plein d'idées », « c'est propre, c'est net », « les pâtes sont pour moi bien cuites », «  la crème va bien ».
-> QUATRIÈME PLACE pour Alexis.

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BONUS MULTIMEDIA : En suède, deux frangins sortis de Délivrance préparent aussi de la sauce Mornay, mais de façon plus simple.

Philippe Etchebest
Son plat : Des pâtes, des pâtes, et encore des pâtes
- En réalité : spaghetti en poudre, tagliatelles sauce champignons-comté-vin jaune,cerneaux de noix torréifiés chantilly persillade.
- L'eau des pâtes d'Etchebest est déjà chaude grâce aux bons soins de Maximilien. La triche, la flatterie.
- Etchebest démarre à tombeau ouvert, en renverse sa première préparation de chantilly persillade, les brigades le sifflent comme lorsque l'on renverse une assiette au collège. Etchebest évite d'emplâtrer un candidat, repart aux fourneaux et envoie.
- Monte une spirale de spaghettis dans un moule, y incorpore le mélange de tagliatelles champignons.
- Cette recette me laisse un peu dubitatif. Sans contestation, les juges adorent, la technique est belle, mais je la trouve show-off et un peu farfelue. Je ne conteste pas le talent du maître, mais ça ne m'a pas parlé du tout. Comme quoi je suis peut-être plus attaché à la cuisine italienne qu'on ne le croit - je n'aime pas trop qu'on fasse mumuse avec les pâtes, ça me rappelle l'école maternelle.
- « Quand tu mets un coup, si c'est pas pour faire mal, faut pas le donner ». (brève de physio)
L'avis du jury : « j'aime beaucoup la présentation », « ça donne envie »,  « petite sauce verte émulsionnée », « on arrive bien à définir les goûts », « très beau plat ».
-> ETCHEBEST REMPORTE L'ÉPREUVE. L'honneur est complètement sauf, on voit qui est le patron. Franck l'illustre parfaitement : « Il nous a tous fumé, il nous a tous retourné  ».

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Epreuve 2 : Alléno, the dark knight returns

Se frotter au boss de fin de niveau de la cuisine française dès l'épisode 7 de Top Chef, voilà qui pose l'ambiance de la compétition et des épreuves à venir.  Yannick Alléno, deux fois trois étoiles. Ses trois dernières sont encore toutes neuves et sentent la neige fraîche, celle de Courchevel où il a érigé un véritable laboratoire d'excellence pour gens fortunés au sein du 1947. Alléno y a capturé la cuisine pour en tirer la quintessence. Au sens littéral du terme, il l'extrait. Ses techniques récentes, l'extraction, la cryocondensation, révèlent les saveurs dans leur expression la plus sublime et la plus pure. Alléno peut prendre une vieille clio d'occase et vous en faire un tiramisu aux cèpes sans que vous en compreniez rien. En plus  il est gaulé, il porte la blouse comme personne, s'intéresse à tout ce qui se passe sur le plan de travail. Pour Top Chef, il va être didactique et méchant comme un pou. Bref, une épreuve parfaite. Ce qu'il fallait faire : réinventer le boudin noir aux pommes, le rendre photogénique. Les quatre plus beaux plats en photos sont goûtés par le maestro, qui en sauvera trois de la dernière chance. Le plus beau plat aura droit à sa photo dans le magazine cossu de Yannick Alléno, « Yam ». Ce que j'aurais fait : « Boudin pomme inversé, façon twitta » - une compote de pomme roulée en boudin, et une boule de boudin en forme de pomme. J'aurais snappé le tout avec ce filtre couronne en fleurs qui rend tout le monde super mignonne.  Le twist : le boudin ressemble à du caca dans 95% des cas. Cette épreuve a été un désastre fécal absolu. La Démonstration d'Alléno - Pour prouver aux candidats que ces 5% de photogénie boudinesque peuvent être facilement atteints, Yannick Alléno leur fait une démonstration.

- GROS CARTON ROUGE pour M6 qui a terriblement monté et accéléré cette séquence qui nous aurait laissé pleinement savourer la maîtrise du chef.
- Le peu qu'on en voit est impressionnant
- Alléno se fait une chantilly de sang très calmement, confit à la perfection une rondelle parfaite de granny smith, puis duxelle de cèpes confit d'oignons, et meringue de pois chiches qu'il fourre de cette chantilly.
- Chantilly de sang, meringue de pois chiche… Vous êtes sur une autre planète. A ce moment-là de l'épreuve, Alléno aurait pu continuer et on aurait tout encaissé, churros de boeuf, sorbet de brochettes, coulis d'iphone.
- A chaque geste du chef, les candidats poussent des cris d'admiration comme s'il rentrait des 720° en half pipe.
- Ce plan ou Alléno fait goûter sa chantilly de sang possède un côté un peu christique. Les candidats trempent le doigt et mangent, ceci est mon sang, eucharistie admirative dont tout le monde ressort un peu éprouvé.

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Jérémie
- Son plat : je n'ai pas noté le nom de son plat, mais je vais le baptiser Pomme à moelle de boudin façon Picasso.
- Jérémie va prendre une décision plutôt sage :  travailler le coté graphique au détriment de la sophistication technique extrême dont il est parfois capable.
- Il plonge ses pommes évidées dans un sirop léger beurre cannelle, qu'il farcit ensuite d'une farce simple au boudin.
- On retrouve un Jérémie qu'on avait rencontré lors du premier épisode, au contact des chefs Darroze, Sarran et Etchebest. A proximité d'Alléno, Jérémie passe à 10% de ses capacités culinaires et réclame un moule de noix. 
- On comprend le trac. Cuisiner pour et sous les yeux de Yannick Alléno est un privilège rare. 
- A mon sens, le résultat est le plus photogénique de toutes les propositions, avec celle de Guillaume - du moins, un des rares plats  pour lesquels le mot « caca » n'a pas clignoté en lettres de néon dans mon cerveau. Son boudin aux pommes ressemble à deux os à moelles cubistes, parfaitement dressés, sillon de fruits secs et petites feuilles très fin et élégant, cela fonctionne bien.

Alexis
- Son plat : mousse de boudin grillé, baies de genièvres, pomme caramélisée, chutney pomme acidulée.
- J'ai parlé tout à l'heure de la qualité majeure d'Alexis : son palais surdoué, mais moins de son principal défaut : le dressage. Avec du boudin dans le game, j'ai très peur que son plat ressemble aux toilettes de la gare de Dublin un lendemain de St Patrick.
- Alexis a une idée de ouf : il voit le boudin en barbecue, il a un flash mediumnique, il faut griller ces boudins sur un barbecue, ici, maintenant, dans les studios de Top Chef. Il trouve du charbon de bois, improvise un barbecue dans le four et pose une ambiance bien gitane, en relançant la cuisson au chalumeau et en jubilant. On sent d'ici la délicieuse odeur grillée.
- Alléno est impressionné. Lui et Alexis sont à deux doigts de se rouler des bédos autour du feu en écoutant Tryo. Ça doit changer le chef des milliardaires russes de Courchevel 1800. On est plus dans l'ambiance Auberge de Jeunesse de Courchevel 1550 (blague de riche).
- Au final je trouve le résultat pas terrible, mais le jeu de lumières qu'offre la gelée sur le plat d'Alexis va le sauver. BONUS MULTIMEDIA : les vidéos de voeux du groupe Alléno sont toujours savoureuses. On a eu droit cette année à une reprise karaoke de Grease (points bonus pour Florence Cane, D.G du groupe, en Olivia Newton-John), mais la meilleure mouture reste 2016 la parodie du Grand Restaurant dans laquelle Yannick Septime chorégraphie le service. Grosse déconne.

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Guillaume
- Ma recette préférée de toutes pour son inventivité et son graphisme.
- Guillaume réalise une pâte à raviolis en y incorporant du sang, ce qui lui donne une teinte cardinal super impressionnante. Il y pose une pomme confite au cidre, puis une gelée de pomme verte et poivre.
- Alléno est enthousiasmé par l'idée et la technique.
- Une fois la cuisson réalisée, Alléno, qui s'attendait à ce que les ravioles deviennent noires, lâche immédiatement Guillaume dans son délire comme Thierry Solère lâcha Fillon : « ah je voyais pas ça comme ça  », « c'est raté là  », « la photo ça risque d'être un peu chaud  », «j'ai un peu les boules  ». Le faux plan massif. Guillaume est dégoûté.
- Guillaume rattrape le coup, fait un rappel couleur en emporte-piéçant de la pomme et la raviole, le résultat est carré, plutôt joli et intriguant.

Giacinta
- Ça tord quand même un peu les tripes de voir Giacinta cuisiner pour Alléno. Mais soyons honnête : elle va bien s'en sortir. Pas un chef d'oeuvre, bien sûr elle ira en deuxième chance, mais l'honneur est sauf pour notre sympathique italienne.
- Fidèle à sa technique habituelle, Giacinta entame son plat par 40 minutes de chouine. Elle ne connait pas le boudin. Top Chef France aurait pu faire l'effort de ne pas proposer d'ingrédients français pour Giacinta.
- Giacinta décide de passer au feeling et cuisine le boudin sous toutes ses formes, elle déchire littéralement le boudin, le fait fondre, l'émiette, défonce 300 ans de tradition française, c'est un démontage en règle.
- Elle a soudainement une idée : elle émiette le boudin pour le faire carboniser dans le four. Alerté par l'odeur, Alléno arrive paniqué. S'en suit un dialogue magnifique :

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GIACINTA - Je veux faire comme un cacao, juste de boudin. ALLENO goûte.
ALLENO - C'est pas bon, hein ?
GIACINTA - C'est pas bon.

- Gia réalise finalement un mille-feuille avec de la pâte à brick, mousse au boudin, compote de pomme. Ça ne passera pas mais vous n'avez pas idée de ce à quoi on échappe.

DISCLAIMER : à partir de cet endroit du debrief, et ce depuis la première fois depuis que je chronique pour vous Top Chef, je ne me sens pas légitime. Pourquoi ? Parce que je vais avoir un avis systématiquement contraire de celui d'un chef six étoilés. Plutôt que de me lancer dans un clash dont je n'aurais pas le niveau, je met donc ça sur le compte de mon ignorance.  Pour résumer, préparez-vous à un festival de cacas sur assiettes, applaudis par le plus grand Chef de France. Je n'ai rien compris.

Julien
- Son plat : crotte de teckel, pomme caramélisée au champignon, purée pomme de terre vin jaune.
- Les choses commencent immédiatement bien pour Julien qui se fait démonter par Alléno pour son plan de travail dégueulasse, Alléno le pulvérise, sort son téléphone et assène : « je vais prendre une photo, comme ça je vais montrer à mes mecs comment ne pas travailler ». Méchant comme un pou, je vous dis.
- Julien prépare une quenelle de boudin parfaitement lisse. Si l'on avait pas vu la séquence de préparation, j'aurais vraiment cru en voyant le plat qu'il s'était accroupi au-dessus de l'assiette pour poser une pêche d'anthologie.
- Alléno adore.

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Franck
Son plat : un bazar en plusieurs services, à base de soupe pomme aux oignons, gelée pommes tremblotantes, diarrhée de pop star et croustillant pommes boudin.
- « Si je suis pas sélectionné Papa, j'arrête le métier. Je deviens bonne sœur, j'arrête tout, je deviens curé, vous me voyez plus, je change de nom, j'arrête tout »
- Je ne savais pas que Franck Pellux avait été un élève d'Alléno ! Et vous ne devinerez jamais où ?! Au 1947, le restaurant triple étoilé de Courchevel ! Comme sous-chef d'abord, puis chef de cuisine. Chef de cuisine au 1947 ! Les bras et le boudin m'en tombent.

Yannick Alleno, Sarah, l'épouse de Franck, et Franck « Papa » Pelux

- La complicité entre Alléno et Franck est évidente, et donne lieu à l'extrait le plus drôle de cet épisode, quand dans un numéro de regards et de faux airs contrariés, Alléno cherche à semer le doute et planter la graine dans le cerveau de Franck. Mais le bambou plie et ne se romps pas. Comme dans un vieux couple, Franck désamorce le piège de son ancien mentor et poursuit son plat. 
- Ce plat, en plusieurs service, me déçoit à deux endroits. Tout d'abord, par le renouvellement de sa technique de ravioli tripode qui nous avait ébloui à l'EPISODE D'AVANT. On se sent un peu floué, et on sait que Franck vaut mieux que deux techniques de drague identiques à la suite. L'huile de bergamote nous empêche de lui faire la gueule au dernier moment. Deuxième point décevant : une énorme flaque de caca allégé dans une des assiettes.
- Yannick Alléno adore.

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Maximilien
Son plat : espuma de boudin, soupe montée de boudin « tourista à Cancun », fond pomme confite. 
- Maximilien ne me ravit pas non plus pour cet épisode. Il élabore une recette qui ne lui ressemble pas tellement, pose sa pauvre mouillette au bord d'un lac titicaca.
- Alléno lui reproche un manque de netteté sur son travail, et Maxou en aparté se récite en mantra une devise absolument effrayante : « n'admet jamais tes erreur ».

ALLENO JUGE LES VISUELS 1. JULIEN : SELECTIONNE, COUP DE COEUR (?!)
2. GUILLAUME : SELECTIONNE AVEC RESERVES sur le teint et les couleurs.
3. ALEXIS : SELECTIONNE
4. GIACINTA : NON SELECTIONNEE -> Dernière chance !  « cette assiette m'inspire pas grand chose »
5. MAXIMILIEN : NON SELECTIONNE -> Dernière chance « le boudin n'est pas assez mis en valeur » (brève de physio)
6. FRANCK : SELECTIONNE
7. JEREMIE : SELECTIONNE, dans un coup de théâtre rarissime dans Top Chef puisque M.Alléno ne devait sélectionner que 4 photos mais obtient une wildcard, suite à son grand coup de coeur visuel pour le plat de Jérémie.

ALLENO DEGUSTE Plat de Julien : « C'est bon, très équilibré », «Trame assez virile, franche, directe ».
-> JULIEN COUP DE COEUR D'ALLENO, QUALIFIE POUR L'EPISODE 8

Plat de Guillaume : « Pâte un peu épaisse » « Equilibre pomme boudin très agréable »
-> GUILLAUME EN DERNIERE CHANCE

Plat d'Alexis : « Belle texture de gelée », « Une certaine bourgeoisie. Le boudin est presque assagi, alors qu'il est habitude métallique ».
-> ALEXIS QUALIFIE EN TROISIÈME PLACE POUR L'EPISODE 8

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Plat de Franck : « C'est bon ça ». « C'est beau ». « Du gros travail, là ». « Ça marche, très fort. »
-> FRANCK QUALIFIE EN SECONDE PLACE POUR L'EPISODE 8 Plat de Jérémie : « Vous avez bien traité le sujet », « Moins convaincu par la noix »
-> JEREMIE EN DERNIERE CHANCE

Guillaume et Jérémie en dernière chance ! Une catastrophe annoncée. Le ciel s'assombrit pour deux de nos candidats favoris.

Épreuve de la dernière chance : Arnaque aux Saint-Jacques

Ce qu'il fallait faire : sublimer la Saint-Jacques.
Ce que j'aurais fait : la saint Jacques ayant lieu le 25 Juillet, cela m'aurait laissé largement le temps d'organiser une pool party d'anthologie avec Alexis au barbecue, Maximilien aux platines, Jérémie à la physio, Julien pour les substances illicites, Franck aux congas et Giacinta en police du look, bannissant de la piscine tous les maillots trop moule-noix.

Giacinta
Son plat : boudin de saint-jacques, pou'ée de chou-fleur, queer de saint-jacques (sic).
- Giacinta n'est pas contente des Saint-Jacques non plus. QUELQUE SOIT LE THEME GIACINTA CRISE. QUE VEUT-ELLE ?
- « Je dois décoller mon queer de ça », « Mon queer va surprendre le joui » (brève de backroom)
- Je me suis renseigné sur cet étonnant cuir qui va sauver Giacinta de l'élimination de par son originalité. La seule technique de « cuir » au four que j'ai retrouvé en abondance sur internet concerne certaines pâtes de fruits, les leather fruits, qui sont réalisés avec la même technique : pâte étalée au four à 70° le plus longtemps possible (parfois jusqu'à 10 heures). La recette est même assez usitée aux Etats-Unis, car c'est à partir de ce leather fruit que les Américains réalisent les « roll-ups », ces friandises en forme de rouleaux. Giacinta a marmitonné, en remplaçant les fruits par de la Saint-Jacques, et ses zoms ont adoré. Bien joué.
L'avis du jury : « C'est une assiette pleine de mystères », « Ce cuir, c'est vraiment surprenant », « Pour moi le pari est réussi : y'a la surprise, et c'est bon », « j'aurais aimé retrouver une pièce de Saint-Jacques ». 
-> GIACINTA QUALIFIEE POUR L' EPISODE 8. C'EST LA CATA.

Maximilien
Son plat : Saint-Jacques rôties à la scandinave, Saint-Jacques en salade à l'asiatique.
- En réalité : carpaccio de Saint-Jacques crues, salade poivrons, mangue, concombres, radis, Saint-Jacques rôties.
L'avis du jury : « Surprenant de marier les contraires, visuellement ce n'est pas une assiette très engageante. Ça manque de netteté », « très agréable à la dégustation« «sa petite salade asiatique, c'est vrai, plaisant à manger »,  « il y a de l'harmonie, de l'équilibre dans cette assiette ».
-> MAXOU QUALIFIE POUR L' EPISODE 8. 

Jérémie
Son plat : Saint-Jacques, carottes, orange, vanille, jus des barbes acidulé.
- Après son pigeon à l'huître de la semaine dernière, Jérémie m'a encore fait très peur. Pour l'hypertension, c'est très dur d'avoir choisi Jérémie comme favori. - Association carotte orange vanille prometteuse. Malheureusement, Jérémie mésestime le temps de cuisson de ses carottes, et doit abandonner au dernier moment.
- « Tant pis pour mes rondelles » ( brève de backroom )
- Transforme ses carottes en purée de carotte. Les carottes sont cuites.
L'avis du jury : « Visuellement assez moyen », « comme ça à l'œil nu, beaucoup d'inquiétude », « la cuisson de la Saint-Jacques est réussie », « c'est pas désagréable quand on goûte tout ensemble »
-> JÉRÉMIE SAUVE IN EXTREMIS, QUALIFIE POUR L'EPISODE 8.

Guillaume
Son plat : Fleur de  Saint-Jacques cru et Sechuan - Saint-Jacques confites à l'anis vert.
- Guillaume veut prendre un risque, c'est pour ça qu'on l'aime. 
- « Faut que je fasse du Guillaume, pousser le vice à fond, jouer la carte de la technicité, de la complexité du goût »
- Guillaume compose un bungalow gustatif, mais dégoupille une grenade pour la faire rouler à l'intérieur : des sechuan buttons, un ingrédient de maître que Ferran Adria notamment affectionne, mais dont la puissance électrique est si forte que la police canadienne s'en sert comme tasers (anecdote fausse). Trêve de plaisanteries, certains comparent sa dégustation à la poudre pétillante et acidulée que l'on mangeait en sachet quand on était gamins, ou à une pile 9 volts qu'on lécherait.

- Hélène Darroze en croque une à pleine bouche, sa langue triple de volume et c'est fini pour Guillaume. L'avis du jury : « j'ai plein de petites fourmis dans la langue », « c'est dommage, s'il y avait pas eu ça, ç'aurait pu faire une belle harmonie »
-> GUILLAUME ELIMINE DE TOP CHEF !!!

Un des candidats favoris de l'émission, et sûrement un des plus clivants, quitte la compétition en laissant derrière lui plusieurs candidats très nettement inférieurs à lui. La comédie a assez duré et l'injustice à ses limites. Le peuple gronde ! J'ai appris à apprécier Guillaume dont je m'étais méfié au début de la compétition, ne voyant en lui qu'un archétype de ces nouveaux cuisiniers parisiens aux faux airs de punks artistes. J'avais raison et tort à la fois : Guillaume représente effectivement cette génération gastrohipster, mais aura prouvé tout au long de la compétition que cette génération avait des idées, énormément de talent, de technique, tout en sachant respecter l'héritage de notre cuisine (remember Georges Blanc et le magnifique poulet de Guillaume) en la remettant systématiquement en question. On retrouvera Guillaume qui aura suite à ce passage honorable encore plus d'abonnés Instagram et de nouveaux clients, dont il pourra électrocuter les langues en douceur, et avec leur consentement. Désolé d'avoir été un peu long aujourd'hui, mais… Top Chef n'est pas un programme si anecdotique, surtout quand Yannick Alléno ou des meilleurs ouvriers de France nous montrent leur cuisine. Si on ne passe pas un peu de temps sur ces moments, sur quoi passer du temps lorsque l'on parle de bouffe ? On y voit toutes les générations de cette nouvelle cuisine française. Je remercie Munchies de me laisser cette tribune sans limite de kilosignes pour m'en émouvoir. La belle cuisine nécessite beaucoup de lettres.

A la semaine prochaine pour la suite de Top Chef !

LES QUALIFIÉS - MON TOP PERSONNEL : 
FRANCK PELUX 18/20 (+0.5)
MAXIMILIEN DIENST 17/20 (=) 
JEREMIE IZARN* 17/20 (=)
ALEXIS DELASSAUX 16/20 (+0.5)
JULIEN WAUTHIER 16/20 (+1)
GIACINTA TRIVERO 0/20 (+5)

Le candidat portant une astérisque est mon favori restant.

Pour vous refaire tous les débriefs d'Henry, rendez-vous sur la page dédiée ici. Sinon, rendez-vous à la semaine prochaine, même jour, même heure pour une nouvelle chronique livrée, comme toujours, au cul du camion.


Pour prolonger le plaisir, dilatez-vous les membranes avec le débrief du dernier épisode dans le dernier épisode de « Spoiler Arrière » Top Chef Édition, le podcast d'Henry Michel.