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La science dit que c'est plus stressant d’être serveur que neurochirurgien

Une nouvelle étude montre que les jobs pénibles, peu gratifiants et qui n'offrent pas d'autonomie aux employés sont parmi les plus préjudiciables pour la santé physique et mentale.
Phoebe Hurst
London, GB

Ce n'est un secret pour personne, le métier de serveur est une galère sans nom. Les horaires de taf condamnent toute vie sociale, le salaire négligeable fait passer votre vie pour un roman de Dickens et les retours en bus servent surtout à soigner vos pieds éclatés. Pendant que le reste du monde se met bien, il faut aussi – dans le pire des cas – se taper les avances de clients éméchés.

Et pourtant, une fois dans la peau du client, on ne peut s'empêcher d'être un poil exigeant. Voire passablement irrité quand cette serveuse vous apporte pour la troisième fois une brune alors que vous avez demandé une blonde, ou que ce serveur semble avoir oublié que vous aviez pris la peine de stipuler ; pas de coriandre dans mon bobun sous aucun prétexte capisce ?

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Vous allez bientôt regretter d'avoir manifesté ostensiblement votre colère parce que les serveurs et les serveuses méritent beaucoup plus de respect et de compassion que ce que l'on croit.

Une nouvelle étude démontre que les jobs difficiles et sans réelle marge de manœuvre – entre ici le serveur des brunchs dominicaux et son « shift » de 12 heures d'affilée – ont un impact particulièrement négatif sur la santé physique et mentale de ceux qui les exercent.

Vous voulez toujours balancer une remarque passive-agressive à cette pauvre serveuse qui vous a apporté une corbeille de pain complet alors que vous ne mangez pas de gluten ?

Ce sont des scientifiques de l'Université Médicale du Sud de Canton qui ont mené ces recherches et analysé les résultats de six études précédentes sur la santé au travail menées auprès d'un panel de 138 700 personnes.

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Avec les informations recueillies, les chercheurs ont défini une typologie, classant les différentes activités professionnelles dans 4 catégories en fonction de l'autonomie et de l'impact psychologique ressenti.

Les métiers qui ne laissent aucune liberté et qui ne demandent pas de qualifications particulières – des tâches manuelles, simples et répétitives – sont des métiers « passifs ». À l'inverse, des professions qui laissent beaucoup de marge de manœuvre – être architecte ou chercheur – sont « peu stressantes ». Celles qui sont à la fois dures psychologiquement mais permettent une grande indépendance – professeurs, médecins – sont qualifiées d'« actives ».

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Si vous avez suivi jusque-là, vous pouvez en déduire que la quatrième catégorie – « très stressante » – regroupe les métiers qui fatiguent psychologiquement sans donner beaucoup de liberté. Vous pouvez y ranger votre pote qui sert sans broncher des clients relous.

L'étude conclut qu'un serveur a 22% de « chances » en plus de faire un AVC par rapport à quelqu'un exerçant un métier peu stressant. Et si l'on considère seulement les femmes, cette probabilité grimpe à 33%.

Pour les chercheurs, avoir un métier avec beaucoup de responsabilités peut augmenter la pression artérielle, mais le stress au travail dépend davantage de la manière dont vous appréhendez votre job ; est-ce que vous vous sentez autonome et respecté. Après une journée de travail, on peut supputer qu'un neurochirurgien sera épuisé mentalement, mais il se sentira clairement plus respecté et important qu'une serveuse qui s'est pris une assiette de purée balancée par un enfant faisant un caca nerveux – sans pourboire. De fait, ceux qui exercent un taf à haute responsabilité mais moins exigeant psychologiquement n'ont pas plus de risques de se taper un AVC ou des problèmes cardio-vasculaires.

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En plus d'avoir régulièrement des horaires décalés – ce qui affecte leur santé sur le long terme – les serveurs et serveuses sont souvent amenés à boire et à fumer, notent les scientifiques. Ce qui n'arrange pas le pourcentage de risque d'accident cardiaque, voire de développer des problèmes de santé mentale.

Dingli Xu, de l'Université Médicale de Canton, conclut : « développer des problèmes cardio-vasculaires est souvent lié au stress, mais les études sur le sujet des AVC et de la pénibilité du travail ont des conclusions assez différentes. Il est cependant possible que le stress au travail engendre de mauvaises habitudes de vie, comme une alimentation déséquilibrée, le tabagisme ou une trop grande sédentarité. »

Repensez donc à ça, la prochaine fois que vous êtes à deux doigts de râler parce que ça fait 5 minutes que vous avez demandé une carafe d'eau pour accompagner vos œufs Bénédicte.