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Être végan a fait de moi un meilleur joueur de poker

Après avoir remporté un World Series au début des années 90, j'ai réalisé que mon compte en banque était bien plus équilibré que mon alimentation.
Foto von Images Money via Flickr

_Vainqueur de six bracelets World Series Of Poker et de deux European Poker Tours, Daniel Negreanu mérite bien sa place au Hall of Fame de la discipline. Baptisé « Kid Poker » après sa première victoire à 23 piges, Negreanu est considéré comme le joueur pro ayant amassé le plus d'oseille sur le tapis. Il fait accessoirement des caméos dans X-Men Origins : Wolverine et un clip de Katy Perry, « Waking Up in Vegas ». Le Canadien est loin du stéréotype du joueur de poker carburant à la bière et aux clopes. Ça fait plus de dix ans qu'il est végan et il travaille aujourd'hui avec James Cameron sur un documentaire qui vise à déconstruire l'idée que « les vrais hommes mangent de la bidoche »._

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Niveau alimentation, mes parents ont tout fait pour m'inculquer des habitudes saines. À l'école, pendant que mes amis mangeaient du MacDo, je sortais un plat préparé avec amour par ma mère. Je détestais ça, mais rétrospectivement, je lui suis reconnaissant.

J'ai arrêté mes études pour devenir joueur de poker à l'âge de 21 ans, quittant Toronto pour tenter ma chance avec les pros à Las Vegas. Là-bas, j'avais le même régime que n'importe quel individu assis à la table de jeu dans les années 1990 : des burgers et des steaks servis avec des frites ou de la purée et arrosés de litres de vin, de bière et de vodka. Je n'avalais absolument aucun produit frais et je me sentais mal dans mes pompes.

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L'absence de nourriture bonne pour les méninges ne m'a pas empêché de remporter le World Series of Poker en 1998 – peut-être parce que tout le monde mangeait la même merde. À l'époque, j'étais plus jeune à remporter cette compétition.

Mon compte en banque était bien plus équilibré que mon alimentation. J'ai vite compris que j'allais devoir faire des sacrifices. Je ne voulais pas tout mettre sur le dos de l'alcool, j'ai donc décidé que c'était sans doute la viande qui me rendait patraque et je suis devenu végétarien en 2000. Les autres joueurs de poker se moquaient de moi. Il y avait ce préjugé que « les vrais hommes mangent de la viande » – et c'est vrai qu'autour du tapis, ils bouffaient des tas de conneries et notamment des monceaux d'animaux morts.

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Au début, je n'ai pas senti d'amélioration notable. Je ne savais pas ce que je devais manger et il n'existait pas beaucoup d'alternatives pour les végétariens à l'époque, surtout dans l'univers des tournois de poker. Je m'étais embarqué dans un régime de pizzas quatre fromages qui était aussi mauvais que le précédent : aucun produit frais ou nutritif – la viande en moins.

Je suis passé au véganisme en 2006, au moment où j'ai commencé à prendre au sérieux l'idée d'une alimentation saine. Je savais que les produits laitiers n'étaient pas bons – personne ne dira le contraire. Pour aller plus loin, j'ai fait mes propres recherches. J'aime bien me présenter comme un étudiant nutritionniste, je lis beaucoup de conseils en ligne sur des sites comme Raw Till 4. J'en discute aussi avec Fabian Quoss [un collègue joueur professionnel défenseur du régime paléo]. Ça donne des conversations originales autour de la table de poker. J'apprends beaucoup de lui et vice versa.

Les autres joueurs de poker se moquaient de moi. Il y avait ce préjugé que « les vrais hommes mangent de la viande » – et c'est vrai qu'autour du tapis, ils bouffaient des tas de conneries et notamment des monceaux d'animaux morts.

À présent je sais ce que je dois manger, donc il faut juste que je m'y tienne ! Quand je suis chez moi à Vegas c'est facile parce que j'ai deux assistants qui me préparent des plats végans très équilibrés. Ils me font du fromage végan à partir de noix de cajou et des crackers avec un mélange de graines de lin et de potiron.

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Mais quand je voyage pour des tournois, c'est un peu plus compliqué. Je dois prévoir mon menu parce que dans certains endroits en Europe, rien n'est prévu pour les végans. Alors que moi quand j'ai la dalle, je m'énerve vite. J'embarque donc dans mes valises des barres protéinées et d'autres snacks de Go Raw, comme des cookies au chocolat à base de noix de coco, de dates, de graines de sésame et du cacao – tout est bio. Ils ont aussi ces petits biscuits apéros qui ont vraiment le goût de pizza mais qui sont juste faits avec des graines bios et des tomates.

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J'embarque aussi de l'eau de coco, du lait d'amande, des graines de chia qui sont riches en oméga-3 et du sel rose de l'Himalaya qui est plein de minéraux et moins riche en sodium que le sel normal. Je prends aussi mon blender et dès que j'atterris quelque part, mon premier réflexe c'est direction le supermarché où j'achète mes fruits et légumes. Je fais ensuite ma petite tambouille dans ma chambre d'hôtel et j'emballe ce que je vais manger dans un sac réfrigérant. J'ai tout ce qu'il me faut sur moi lors d'un tournoi.

Les autres joueurs acceptent de plus en plus mon véganisme, ils y adhèrent. Avant ils s'en moquaient, mais à présent ils veulent tous le tester. Récemment, je me suis fait livrer douze sacs de bouffe en provenance de Loving Hut, un restaurant asiatique végan. Je les ai répartis entre les différentes tables et tout le monde a adoré.

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Le monde du poker a changé : dans le passé, les meilleurs joueurs étaient obèses. Maintenant, ils gardent la ligne. Ils ont troqué leur poitrine contre des pectoraux. Les joueurs sont aussi plus éduqués. Ils sont malins, cherchent un maximum d'informations et se préoccupent de leur santé. Ce n'est plus comme avant.

Mes envies ont évolué : je n'ai plus besoin de sucreries. Si je devais choisir un dernier repas, ce serait des frites, des falafels et du houmous.

Certains hôtels dans lesquels nous créchons ont besoin de suivre le mouvement pour répondre à nos nouveaux besoins. Lors d'un déplacement récent, j'ai demandé un frigo supplémentaire dans ma chambre qu'ils m'ont refusé parce qu'ils ne voulaient pas que je débarque avec ma propre nourriture. Ils m'ont dit qu'ils pouvaient me fournir les produits que j'avais envie de manger. J'ai dit OK et je leur ai donné une liste, mais ils n'ont pas été foutus de me trouver quoi que ce soit. J'ai pris un seau plein de glaçons et j'ai conservé ma nourriture dans l'évier.

Mon régime est maintenant meilleur que jamais. J'ai commencé le véganisme pour des raisons de santé mais je continue aussi pour l'environnement et le bien-être animal. La façon dont l'industrie agro-alimentaire traite les animaux est abjecte. On les gave de stéroïdes, on coupe les becs des poulets. Vous finissez par bouffer des poulets malades qui ont grandi trop vite au milieu de leur merde. C'est un véritable holocauste animal.

Mon alimentation exclusivement végan était très riche en gluten mais je suis allé voir un spécialiste en novembre dernier. Depuis, je ne mange plus aucun produit transformé. Mon régime est sans gluten, sans lait et sans blé. J'aime la bière et le pop-corn, mais je n'en mange plus. J'ai voulu transformer mon corps pour qu'il brûle la graisse plutôt que le sucre. Mes envies ont évolué : je n'ai plus besoin de sucreries. Si je devais choisir un dernier repas, ce serait des frites, des falafels et du houmous.

Je ne fais pas de prosélytisme en essayant de convertir les gens au véganisme. Si l'on me demande un conseil, je dis simplement qu'il faut manger sainement.

Propos rapportés par Samantha Rea.