Chez les cuisiniers en herbe d'Amsterdam

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Chez les cuisiniers en herbe d'Amsterdam

Légalement, aux Pays-Bas, seul le space cake est autorisé à la vente. On a rencontré les stoners gourmets qui préparent les aliments aux cannabis de demain.

Ma dernière rencontre avec un aliment infusé à la weed remonte à cette moitié de space cake, tout ce qu'il y a de plus classique, que j'avais avalée un jour où j'avais sauté le dîner. Ce qui s'est avéré être une très mauvaise idée – même si ouais, je me suis bien régalé.

Quatre heures après, j'étais allongé dans le coin d'une salle de bains. Tremblant, je pensais que rester immobile était la meilleure solution pour éviter l'arrêt cardiaque. J'avais beau savoir que le cannabis n'était pas mortel, je commençais à avoir de sérieux doutes sur la question.

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Golden Green Bakery 3

Ryan de la Golden Green Bakery. Photo de Mathieu Custers.

Depuis, les années ont passé (je suis toujours en vie) et le space cake reste l'unique aliment fourré à la beuh que l'on consomme aux Pays-Bas. Ce n'est pas comme aux États-Unis où le secteur fricote carrément avec la haute gastronomie pour servir aux clients du THC et du CBD de manière agréable et plutôt saine.

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Là où quatre États autorisent la vente du cannabis sous toutes ses formes, les Néerlandais n'ont pas la même marge de manœuvre. Les coffee-shops peuvent vendre à manger des produits « augmentés » mais uniquement sous la forme de space cake. Et ce petit carré sucré est très réglementé.

Aux Pays-Bas, le seul space cake légal est celui qui est fait à base d'herbe broyée. En général, on conseille plutôt de faire fondre du beurre et d'y infuser la weed pour ensuite utiliser cette matière grasse dans le gâteau.

Gummiberen edibles

Ryan et ses petits oursons bien chargés. Photo de Mathieu Custers.

Mais la justice néerlandaise en a décidé autrement. En chauffant la weed dans le beurre, on en extrait le THC. Pas de chance, au pays de la fumette, cette substance est classée dans la catégorie drogue dure. Ce n'est pas très logique, mais c'est comme ça.

Aujourd'hui, les aliments infusés au cannabis sont souvent faits à base de concentré de beuh. On utilise par exemple du CO2 pour extraire les éléments actifs de la feuille de marijuana et se débarrasser ensuite des résidus de la plante. C'est illégal mais bien meilleur pour la santé que de la rouler – et c'est une bonne technique pour ceux qui n'aiment pas avaler la fumée.

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Ryan est l'un des rares à tenter, malgré tout, d'innover sur le marché. Il veut aller plus loin que le traditionnel space cake. Pour faire les choses de manière professionnelle, il a même lancé sa startup : Golden Green Bakeries. Nous l'avons rencontré dans le Quartier Rouge d'Amsterdam, à la sortie du Cannabis College. Sa journée de taf terminée, il tenait dans sa main un sac rempli de petites gourmandises.

Golden Green Bakery 2

Cela fait quatre mois que Ryan bosse sur son projet et il y croit dur comme fer. « Au départ, il y avait trop de produits comestibles différents », explique-t-il en s'asseyant dans un canapé du Cannabis College. « Maintenant, on demande souvent aux clients ce qu'ils veulent précisément, non seulement en termes de goût mais aussi de dosage. »

La gamme de Golden Green Bakeries propose du riz soufflé, des oursons en gélatine, du chocolat blanc et des muffins. Pour le dosage, Ryan affiche le taux de THC contenu dans chaque portion : il s'en tient à 10 mg par produit.

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« Si tu n'aimes pas fumer, tu n'aimeras pas vaper non plus », observe Ryan. « Manger par contre, ça va. Tu pourrais même en prendre avec ton café ou ton thé le matin, ou dans une salade le soir. »

Golden Green Bakery 5

Photo de Thieu Custers.L'avantage, c'est qu'on peut vraiment faire varier les goûts. J'ai un concentré qui a un goût de citron que j'ai baptisé Sour Haze. Je l'utilise pour faire plein de trucs : des glaces, des bonbons ou du sirop

MUNCHIES a croisé Stefano au Flevopark d'Amsterdam à l'occasion du Cannabis Liberation Day. Stefano est Italien. Il a quitté la Botte parce que son pays d'origine est beaucoup plus répressif à l'encontre de l'une de ses grandes passions : le cannabis (il aime aussi la musique et le skate).

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Avec son entreprise, Micro Genetics, Stefano a pour mission de produire les meilleures graines possible. Mais il veut aussi innover. Il a installé son atelier dans son appart d'Amsterdam où l'on part faire un tour à la découverte de ses produits.

Pour Stefano, trouver des recettes est un défi. « . »

Stroopwafel Stefano edibles

On voulait voir à quoi ressemble une stroopwaffle au cannabis. Stefano nous en a fait une. On vous file sa recette en bas de l'article.J'ai découvert que le concentré se dilue mieux dans le sirop d'érable. Vous pouvez ensuite l'utiliser dans vos préparations. J'ai aussi trouvé un moyen de le transformer en poudre, ce qui permet de l'intégrer à d'autres produits

« . »

Pour contrôler le goût, il faut faire gaffe au type de weed qu'on utilise. Ce sont les terpènes qui influencent l'arôme. Il s'agit d'un type de substance qu'on trouve dans plusieurs plantes, des conifères au laurier en passant par la marijuana. Et c'est grâce à ça que la beuh a une odeur et un goût si particuliers. Quand on cultive de la marijuana, on essaye de faire varier les terpènes pour donner à la beuh différentes saveurs.

Stefano edibles

Voici Stefano. Photo de l'auteur.Parfois, le concentré de cannabis a un goût trop fort. Il faut apprendre à le maîtriser

Selon Ryan, l'étude des terpènes est une priorité dans les prochaines années. Aujourd'hui, on n'en est qu'aux tâtonnements. On n'a fait qu'effleurer tout qui concerne la modification du goût de l'herbe. L'une des deux filles avec qui Ryan travaille a étudié le design et les innovations alimentaires à l'Université Den Bosch. C'est elle qui est responsable des recettes et la cause de leur succès. Stefano, lui, s'est associé à un chef qui travaille dans un resto d'Amsterdam.

« », note Ryan. Stefano explique que le THC peut parfois causer une sensation étrange dans la gorge – une gène qu'il entend bien gommer à l'avenir. Mais pour cela, il lui faut des gens qui s'y connaissent en la matière.

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Ce qui manque le plus au développement de la cuisine à la weed, ce sont des informations sérieuses et une connaissance scientifique du cannabis. Pourtant, le marché médical pourrait trouver des applications à ce genre d'étude, explique Ryan. « On ne peut pas continuer seuls, il faut qu'on s'y mette tous ensemble pour faire décoller ce secteur. »

Edibles Thijs

Cette poudre peut être utilisée pour préparer des cookies ou des bonbons.

La recette de Stefano pour un sirop et une poudre de cannabis

Pour le sirop :

  • 5 grammes d'extrait.
  • 5 cuillères à soupe (75ml) de sirop d'érable

« Dans un bol, mélangez le concentré avec le sirop. Laissez infuser environ vingt minutes au bain-marie tout en mélangeant régulièrement sinon le THC ne se diffusera pas uniformément dans tout le sirop. »

Et pour transformer le sirop amélioré en poudre, si l'on en croit Stefano :

« Il faut un peu de lait, environ 10 centilitres. Balancez le sirop de cannabis dedans. Mélangez et laissez reposer au frigo pendant deux jours. »

Cet article a été initialement publié en néerlandais sur MUNCHIES NL