Un paradoxe survient lorsque l'on pose le pied sur le sol colombien et que l'on goûte à son premier café. Son caractère âpre et sa dominante minérale – autrement dit, de flotte – en font une boisson absolument imbuvable.
Le café que tout le monde boit ici s'appelle « Tinto » et croyez-moi, c'est un véritable jus de chaussette. On en regrette presque l' Americano de Strarbucks. Je me suis demandé comment le pays troisième exportateur de café au monde pouvait accoucher d'un café aussi dégueulasse.
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La raison est simple : le café de qualité supérieure, qui représente 70 % de la production colombienne, est réservé à l'export et s'envole vers plus de 36 pays. Les Colombiens se contentent de boire les 30 % de café restants : des grains de deuxième et troisième catégories.
Même avec la plus belle des machines, si votre café est bas de gamme, il est impossible de faire un bon espresso ;c'est un peu comme si l'occident avait cultivé le goût du café et que les pays producteurs se contentaient de lui fournir la matière première.
Mais au cœur de la zona cafetera, la région productrice dans laquelle je me suis rendue en Colombie, le café est 100 % arabica, une variété réputée pour être de bonne qualité. Située à 300 kilomètres à l'ouest de Bogota, on produit ici environ 25 % du volume total national. L'arabica a gagné ses lettres de noblesse face au robusta grâce à ses arômes et sa finesse. En contrepartie, sa culture est plus délicate et moins productive.
Alors que le robusta s'accommode des terrains de plaine, l'arabica nécessite quant à lui un climat plus frais et tempéré. En pleine cordillère centrale des Andes, à 11 km au sud de Manizales, la capitale du département de Caldes, l'Hacienda Venecia est une finca cafetera (une ferme de café) qui s'étend sur plus de 120 hectares. C'est donc ici, perchée dans les montagnes à 2 100 mètres d'altitude, entre humidité et chaleur, que j'ai pu découvrir les différentes étapes de fabrication du café.
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La récolte se fait deux fois par an, sans compter la petite récolte intermédiaire moins importante qui intervient entre les deux.
Chaque étape de production a le même but : trier et classer les grains afin de sélectionner les meilleurs. En Colombie, on favorise la méthode dite humide : une fermentation des grains dans l'eau qui permet d'accentuer les arômes et les saveurs.
Cette méthode est un peu plus complexe que la méthode par séchage, mais elle a l'avantage de donner un résultat homogène sur toute la récolte. On a besoin de 50 à 100 litres d'eau pour faire un kilo de café, c'est pourquoi on retrouve un système de récupération et d'épuration d'eau dans toutes les fincas cafeteras.
La phase de torréfaction ne se fait pas sur place mais directement dans les pays importateurs de café. Chaque région du globe a ses préférences de goût, et chaque torréfacteur va donner au café ses propres arômes et son identité gustative en fonction de la demande.
Pour faire torréfier le café, on le fait chauffer entre 210º C et 230º C. On distingue plusieurs cuissons ou « toasts » : léger, médium et intense. Après torréfaction, l'amateur de café identifie d'abord plusieurs goûts (vinaigré, dur ou encore amer) puis des arômes (caramel, noisette, herbé, fumé). Dans les coffee-shops ou sur les terrasses des puristes européens, on parle de café comme de vin. Alors que les Colombiens – eux qui n'ont pas appris à le boire –, aiment leur café comme notre vin : doux et sucré.
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Mon expérience personnelle avec le café Colombien a trouvé son apogée dans la capitale, près de la fameuse place Bolivar. L'odeur du café est telle que je n'ai pas pu résister à entrer dans un de ces cafés pour touristes comme on pourrait en trouver à Brooklyn. C'est pourtant là-bas que j'ai goûté à l'un des meilleurs cafés de toute ma vie. Le café venait de la région de Santanders et le patron du bar était… Américain. Chacun en tirera ses propres conclusions !LIRE AUSSI : De l'art de boire du café, selon David Lynch
Mathilde Coué est une photographe indépendante basée à Paris. Elle est la fondatrice de Studio Artichaut, un studio de photographie spécialisé dans le culinaire.