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Food

Élections allemandes : cochon, bière et soupe de pommes de terre

À la veille du scrutin des fédérales allemandes, on a fait un tour de table des meilleurs arguments culinaires de chaque candidat.
Alexis Ferenczi
Paris, FR
Une broche de kebab et Angela Merkel, chancelière allemande. 30 juin 2009. REUTERS/Thomas Peter.

Si vous êtes candidat à une quelconque élection et que vous n'avez pas été immortalisé en train de boire et manger dans un marché, en marge d'un meeting ou au restau, c'est que vous avez probablement raté votre vocation.

Dans n'importe quelle campagne électorale, la bouffe se retrouve irrémédiablement au centre des débats. Et les législatives allemandes, qui rendent leur verdict dimanche 24 septembre, ne dérogent pas à cette règle.

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Dans un pays où, comme le politologue Philip Manow le soulignait dans Zeit, « la currywurst est devenue une sorte de version républicaine du sceptre monarchique », et où les anciens chanceliers – Gerhard Schröder et Helmut Kohl en tête – avaient pris l'habitude de bouffer en public, la nourriture a une connotation éminemment politique.

Angela Merkel : « J'étais la fille qui mangeait des cacahuètes »

Les Allemands ont donc pu observer certains de leurs candidats s'en donner à cœur joie niveau graille face caméra. Et favorite à sa propre succession, la chancelière Angela Merkel, qui brigue un cinquième mandat, a clairement dominé les débats en matière de cuisine.

Il y a 8 ans, Merkel avait déjà parlé de son attrait pour la soupe de patates, en plus des rouladen – équivalent des paupiettes de l'autre côté du Rhin. Dans le magazine Bunte, elle dévoile cette fois la recette. Du bacon, des carottes, du céleri mais surtout, des pommes de terre « écrasées avec un presse-purée plutôt qu'au mixeur ».

« La currywurst est une sorte de version républicaine du sceptre monarchique »

C'est mieux. Ça évite une consistance élastique et puis, comme le souligne la chancelière, « il reste toujours quelques morceaux dedans ». Forcément, le but de la manœuvre n'est pas de satisfaire les papilles du peuple mais plutôt de gommer l'image particulièrement austère d'Angela.

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La chef d'État a fait l'effort tout au long de sa carrière de jalonner ses interventions médiatiques avec des petites histoires de graille. Au Spiegel, elle racontait en 1994 sa jeunesse : « J'étais la fille qui mangeait des cacahuètes et qui ne dansait jamais ».

Dans une vidéo récente, interrogée par une palanquée d'enfants, elle avouait son amour immodéré pour les spaghetti bolognaise. Confession qui n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd. En déplacement à Heidelberg, la chancelière sortante a été visée par des jets de tomates.

Les autres candidats de ses législatives sont beaucoup moins diserts sur leurs habitudes alimentaires. Ils n'ont pas assez écumé les étals du pays pour avoir les honneurs d'un compte Twitter comme ce Merkel Eating (Merkel mangeant) globalement gênant. Peut-être que Sahra Wagenknecht (candidate de Die Linke) était un poil échaudée par le gâteau au chocolat reçu en pleine figure lors d'un dîner en 2016 ? Peut-être que Martin Schulz (candidat du SPD et ancien président du Parlement européen) n'a pas trouvé mieux que ce repas « sardine et chansons » de 2013 ?

Du côté de l'extrême droite, le parti Alternative für Deutschland (AfD), emmené par Alexander Gauland (qui aimerait profiter de ses élections pour entrer au Bundestag), fait circuler une affiche ambiance « choc des civilisations ». Un porcelet et une citation : « L'Islam, pas compatible avec notre cuisine ».

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Une affiche de l'AfD : « L'Islam, pas compatible avec notre cuisine ».

Les membres de l'AfD se sont aussi élevés contre l'initiative d'Ekeda, un magasin de Hambourg qui a vidé ses rayons des produits étrangers pour souligner le besoin de diversité. Une idée censée montrer à quel point l'alimentation des Allemands repose sur de la bouffe venue de tous les pays. Les clients étaient accueillis avec des pancartes genre « Cet étal est particulièrement chiant sans la diversité », « Voilà à quel point on est vide sans les étrangers ».

Une porte-parole d'Edeka confiait : « Dans nos magasins, nous vendons des produits qui viennent de différentes régions de l'Allemagne. Mais ce n'est qu'avec des aliments venus d'autres pays qu'on peut créer une offre vraiment unique pour les clients. »

Helmut Kohl avait mis la barre très haut en participant au livre de cuisine de sa femme Hannelore intitulé « Un voyage gourmand à travers l'Allemagne » et publié en 1996.

Reprenant avec brio le vieil adage qui dit qu'un peu de déconne vaut toujours mieux que de grands discours, le parti satirique Die PARTEI (qui préconise la reconstruction du mur de Berlin ou la guerre contre le Liechtenstein) s'est attaqué à l'inflation du prix de la bière. À quelques semaines de l'Oktoberfest, c'est malin – ou opportuniste si vous êtes plutôt rosé.

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Bref, cette grosse poilade se termine dimanche. On aura noté qu'aucun des candidats n'est arrivé à la cheville des anciens – Helmut Kohl avait mis la barre très haut en participant au livre de cuisine de sa femme Hannelore intitulé Un voyage gourmand à travers l'Allemagne publié en 1996.

On se revoit dans 4 ans, en espérant que le mot d'ordre reste : « Politiciens de tous les pays, repaissez-vous ! ».