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Brancherons-nous bientôt nos smartphones directement sur nos vêtements ?

Les sapes équipées de panneaux solaires capables de produire toute l'énergie dont on a besoin, c'est peut-être pour demain.

Ce n'est pas forcément la première chose qui vient à l'esprit quand on s'énerve contre la batterie de son téléphone, mais on met bel et bien le doigt sur un des points névralgiques de nos sociétés : l'énergie. Du pétrole à l'eau en passant par le débat autour du nucléaire, une fois débarrassés de leur lexique et de leurs enjeux propres, on en revient toujours au nerf de la guerre. Pourtant, il y a une qui est à disposition, gratuite, et qui ne se détériore pas, juste au-dessus de nos têtes. « En une heure, le soleil fournit l'énergie nécessaire à toute l'humanité », résume le physicien néerlandais expert en la matière, Gert Jan Jongerden. En parallèle, la gourmandise énergétique des objets qui nous entourent va crescendo. Les capacités des batteries ont beau s'améliorer, on se retrouve invariablement sans une once de batterie à 1h du mat au moment où on a le plus besoin de ses potes pour se remettre sur les rails de la sagesse – ou de la soirée. L'enjeu n'est donc plus seulement d'exploiter l'énergie solaire - on sait le faire et de mieux en mieux - mais bien de pouvoir l'exploiter tout en restant mobile. Et pourquoi pas les porter sur, voire dans ses fringues. Tout en évitant si possible de jeter à la face du monde que vous avez passé les 6 derniers mois dans le labo d'un savant fou.

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Depuis le milieu des années 2000, au fil des progrès de la miniaturisation et de la flexibilité des panneaux solaires, les projets textiles associés à cette énergie surgissent aux quatre coins de la planète. Il y a eu la veste de montagne Maier Sports ou celle en jeans Bogner-Mustang, la collection capsule de sacs du Elle/Portable Light Project en 2010, auxquels ont participé Diane Von Furstenberg ou Tommy Hilfiger, ou encore le bikini développé par l'artiste technologique Andrew Schneider en 2011. Et puis, plus récemment, des projets plus ambitieux en termes de style ont enfin vu le jour, avec notamment des parkas Tommy Hilfiger conçues avec Pvilion, un fabricant spécialisé dans les panneaux solaires flexibles basé à Brooklyn. Les unités placées au dos des parkas Tommy étaient à mi-chemin entre un circuit imprimé géant et des armures de Samouraïs, mais permettaient de charger 3 ou 4 fois un iPhone via un câble USB dans la poche avant. Bizarrement, alors que la combinaison entre technologie et une allure compatible avec la vie de tous les jours était plutôt réussie, le projet semble avoir été un « one shot » pour le designer américain, qui n'a pas poussé la collaboration au-delà de 2014. A l'inverse, depuis ses premiers vêtements solaires portables en 2013, la Néerlandaise Pauline Van Dongen s'est emparée de la question de l'énergie solaire portable. En étroite collaboration avec des labos de recherche et des entreprises de pointe, elle explore chaque saison encore un peu plus les possibilités et les progrès de la science photovoltaïque.

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« Je suis fascinée par l'énergie solaire et par l'idée que l'on puisse être une source d'énergie » glisse la créatrice au détour de la vidéo présentant son premier projet, des robes de laine et de cuir dotées de panneaux solaires miniatures rétractables. Les Wearable Solar de Pauline Van Dongen sont sans doute le projet qui a poussé le plus loin la recherche technique et esthétique autour de l'énergie solaire, là ou la plupart des autres propositions se contentaient le plus souvent d'intégrer des panneaux solaires plus ou moins grands, plus ou moins flexibles à un sac (à dos ou à main), une veste ou une casquette. La dernière mouture de ses vêtements solaires date de 2015. La Solar Shirt est un pull recouvert de 120 lamelles solaires ultra-fines, concues par le labo Holst Center, qui permettent de charger un téléphone en quelques heures à peine.

Dans le sillage de ces initiatives, les vêtements ne sont plus seulement des remparts dressés contre les éléments, ils fonctionnent aussi avec ceux-ci. La parka Tommy Hilfiger, qui protège du froid et de la pluie en même temps qu'elle emmagasine l'énérgie solaire, campe bien cette ambivalence.

Toute la difficulté des projets qui articulent mode et technologie se cache dans l'équilibre entre ces deux pôles potentiellement antagonistes. Dès que la balance penche trop d'un coté, l'alliage ne prend pas. Le style est évidemment une affaire de goût, mais les fringues pondues par Tommy Hilfiger et Pauline Van Dongen montrent que cette voie est possible. La lame de fond n'est pas encore en marche et les initiatives voient le jour de manière isolée. Il y a un obstacle économique, avec le coût des matériaux qui ne permet pas encore d'envisager des sapes équipées et tout public, et un obstacle technologique puisqu'on parle encore de lamelles qui sont apposées sur les vêtements. Le ratio superficie-énergie rapportée est un des principaux défauts de l'énergie solaire, mais là encore l'évolution de l'efficacité des panneaux solaires est galopante. Aujourd'hui l'efficacité moyenne d'un panneau solaire flirte avec les 4%. Les technologies développées par AltaDevices ou les travaux universitaires permettent déjà des efficacités plus proches des 25/30%, voire 40%. Ces progrès riment avec moins d'exposition nécessaire pour recharger un panneau solaire, et moins de temps pour recharger une batterie. L'autosuffisance énergétique hors de chez soi, quand on va se frotter aux éléments, semble à portée de main.

Le vrai tournant, celui qui va permettre d'industrialiser la production de vêtements solaires, sera la démocratisation d'un tissu photovoltaïque, qui permette à chaque maille du vêtement de se mettre enfin au boulot pour recharger nos batteries. Le procédé existe en laboratoire, mais il n'a pas encore sauté le pas vers l'industrie textile. Mais le temps où l'on pourra se procurer ce genre de pièces dans des enseignes de prêt à porter s'approche à grands pas. AltaDevices sait faire des panneaux solaires dont l'épaisseur flirte tranquillement avec le micron, soit 40 fois plus fin qu'un cheveu. Alors qu'en 2014, l'Université de Sheffield avait inventé des cellules solaires en spray, début 2016, le MIT vient de pondre un film transparent capable de stocker l'énergie solaire et de la restituer sur demande, qu'il est possible d'appliquer sur une vitre ou un tissu.

Un petit pas pour la mode et la science, mais un grand pas pour nos fins de soirées.