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Les araignées paraissent beaucoup plus grosses aux arachnophobes

Les arachnophobes ne voient clairement pas les choses comme nous, révèle une étude.

Je me souviens parfaitement du jour où je suis devenu arachnophobe, mais aussi du jour où j'ai cessé de l'être. Le premier, c'est simple : à l'époque de l'école primaire, j'étais chez un ami au bord du lac Huron quand, en jouant à cache-cache ou un truc du genre, j'ai couru en plein dans une immense toile d'araignée au milieu de laquelle se trouvait une énorme araignée noire bien poilue. Ça m'avait démoli.

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Le deuxième est plus étrange. En 2007, je somnolais dans un train quand j'ai senti une très légère piqûre sur ma cheville. Ça ne m'a pas perturbé outre mesure jusqu'au lendemain matin quand je me suis retrouvé avec un bouton noirâtre et râpeux sur ladite cheville, qui me grattait un peu. Rien de grave en apparence, sauf que le jour suivant mon pied s'est mis à gonfler, à gratter terriblement, et à suinter du pus comme une grosse éponge. Très vite, tout mon pied et ma cheville ont commencé à ressembler à une sorte de ballon de basket suintant et dégonflé juste ce qu'il faut pour ne pas rebondir. J'ai commencé à paniquer quand j'ai vu que la peau de ma cheville gonflée s'affaissait et coulait sur ma chaussure.

J'avais (probablement) été piqué par une recluse brune (ou "araignée violoniste"), c'est-à-dire ce qui se fait de pire en termes d'araignées. C'était franchement dégoûtant, mais l'infection a vite disparu grâce aux antibiotiques. Surtout, ma peur avait été confrontée à une expérience concrète, et elle semblait avoir disparu. Je préfèrerais que ça ne m'arrive plus jamais, mais au moins maintenant je comprends à quoi j'ai affaire. Après cet épisode, j'ai cessé de considérer les araignées comme des créatures abstraites et terrifiantes, et même tout simplement d'en avoir peur. Elles n'étaient qu'une chose parmi tant d'autres dans l'univers.

Ce que je veux dire, c'est que je comprends très bien l'arachnophobie, mais aussi le point de vue de ceux que les araignées laissent indifférent. Cette différence entre la peur irrationnelle et le flegme de ceux qui disent "bof, c'est juste une araignée" suffit à expliquer pourquoi certaines personnes surestiment totalement la taille réelle des araignées communes (parfois au point de penser sérieusement qu'elles sont plus grosses que les papillons), selon un article publié dans la revue Biological Psychology.

"Imaginez que pendant que vous lisez ces lignes, une araignée grimpe sur votre bureau, commence l'article. Elle vous apparaîtra peut-être minuscule et inoffensive, alors que votre collègue arachnophobe hurlera qu'elle est énorme et terrifiante. Ces situations révèlent l'existence de différences individuelles en termes d'estimation de la taille de certains stimuli désagréables. Elles amènent aussi à se demander si les mots "énorme" et "terrifiant" ne sont que des façons de parler, ou s'ils révèlent quelque chose de plus profond."

L'article relate deux expériences, dont la première est relativement évidente. Prenez un groupe d'individus, dont certains se présentent comme arachnophobes et d'autres non, et montrez-leur des photos d'araignées mais aussi de créatures neutres, telles que des papillons. Les arachnophobes surestiment largement la taille des araignées, ce qui n'est pas surprenant au vu de toutes les recherches déjà menées sur le sujet à propos des araignées, mais aussi d'autres phobies communes comme par exemple les serpents, le vertige et même les croix gammées.

Cette nouvelle étude se distingue par la deuxième expérience, dans laquelle on a présenté aux arachnophobes l'image d'une créature "négative" mais qui n'était pas une araignée : une guêpe. Les guêpes sont clairement des animaux déplaisants, mais les sujets de l'expérience n'en avaient pas une peur irrationnelle. A-t-on observé les mêmes effets ? Nope. Les individus ont correctement estimé la taille des guêpes, sans différence notable avec le groupe des non-arachnophobes. Autrement dit, la déformation de la perception de la taille qui frappe les personnes atteintes de phobies n'affecte pas leur perception du reste de la réalité.

Je ne suis pas certain que cette étude soit révolutionnaire, mais cela reste un sujet intéressant qui va au-delà des seules phobies et de la taille des araignées. Nos émotions (et obsessions) nous mènent en bateau, et cela fait partie du mystère de la perception. Ma perception du monde est différente de la vôtre, qui diffère elle-même de celle de toutes les autres personnes. Nous pouvons nous entendre sur des ordres de grandeur moyens et cela suffit généralement, mais quand notre perception déraille complètement, comme par exemple dans le cas de la dysmorphophobie qui mène à l'anorexie et à la boulimie, les conséquences peuvent être désastreuses.