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BUREAU DES ETUDIANTS

Bizutage : le top 5 de la bêtise estudiantine

Les derniers exploits des étudiants des Arts et Métiers rappellent que la crétinerie et le mauvais goût sont les valeurs les mieux partagées dans les BDE.
Image extraite du film La crème de la crème (Kim Chapiron, 2014)

Le bizutage fait partie de ce que l’élitisme français a de plus moche à offrir : des mecs de 20 ans gavés d’alcool bon marché, portant des perruques et des t-shirts siglés « Bureau des Étudiants » lancés dans un jeu à boire absurde. C’est d’ailleurs pour éradiquer ces spectacles navrants que la France, depuis 1998, punit tout acte de bizutage de 6 moins de prison et 7 500 euros d’amende. Ce qui n’a pas empêché les étudiants les plus « potaches » – l’adjectif sympa pour désigner toute une gamme de sévices plus ou moins graves – de continuer à faire n’importe quoi. Au nom de la déconne, évidemment.

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Face au phénomène, les écoles et les facs ont réagi. C’est ainsi que la prestigieuse école des Arts et Métiers a décidé vendredi 12 janvier de supprimer la « période de transmission des valeurs » - là encore une jolie litote pour évoquer une soirée d’intégration qui a mal tourné. En octobre dernier, seize élèves de première année s’étaient fait tatouer à l’aide de cuillères brûlantes. Un fait divers de plus qui vient rappeler que le mauvais goût et la bêtise sont les deux choses les mieux partagées chez les étudiants tricolores. La preuve en cinq exemples particulièrement hardcore – commentés par Jean-Claude Delarue, membre du collectif SOS Bizutage.

Le plus vulgaire : les « 69 commandements » de la fac de médecine de Caen

Cette année, les étudiants de la fac de médecine de Caen ont fait une entrée fracassante au Panthéon de la blague grasse. Les membres de la « Corpo », l’association qui organise les soirées de la future élite médicale de la région, ont en effet imaginé un « guide » à destination des nouveaux arrivants. À l’intérieur, 69 commandements relevant au mieux du mauvais goût, au pire du délit sexuel. Florilège : « montrer ses couilles aux passants », « se frotter vigoureusement des orties sur le pénis/vagin pendant 20 secondes », « se faire bifler par Rosy avec son gode » ou « tourner un Jacquie et Michel ». Un « jeu » aussi débile que vulgos qui a attiré l’attention de la justice : une enquête a été ouverte, et le week-end d’intégration, interdit.

L’avis de Jean-Claude Delarue : Ce qui est frappant, c’est que ce genre de comportement est jugé à l’aune du milieu social dans lequel il est commis. Quand ils concernent des étudiants promis à un bel avenir, on a tendance à considérer que cela relève de la « bêtise de jeunesse » et que cela ne mérite pas de sacrifier leur carrière. Mais imaginez que cette histoire se soit passée dans une cité ?

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Le plus macabre : le mauvais trip camping des étudiants rennais

300 étudiants réunis dans un camping du Morbihan au mois d’octobre : le scénario, digne d’un teen movie sexy, a carrément tourné au film d’horreur. À la rentrée 2017, un étudiant de 19 ans a ainsi trouvé la mort lors d’un week-end d’intégration d’une fac de chirurgie dentaire. L’autopsie rendra un verdict sobre et implacable : un décès dû à une « alcoolisation massive ». Tout simplement.

L’avis de Jean-Claude Delarue : Les nouvelles écoles qui se sont multipliées ces dernières années cherchent à singer leurs grandes sœurs, plus prestigieuses. Les week-ends d’intégration et les séances de bizutage sont un moyen d’imiter l’esprit « grandes écoles ».

Le plus douloureux : la brûlure de l’enfer des pompiers varois

La tradition du bizutage débile n’est pas l’apanage des étudiants en fac. Dans leur caserne de Callas, dans le Var, de jeunes soldats du feu se sont illustrés par leur bêtise, en juillet 2010. Réveillé en pleine nuit, un apprenti sapeur pompier volontaire a été déshabillé de force, enduit de cirage et de désinfectant. Le but ? Enflammer ses poils pubiens. Parce que c’est marrant, des poils qui brûlent. Ce qui l’est moins, ce sont les brûlures aux testicules dont a souffert le bizut.

L’avis de Jean-Claude Delarue : Le bizutage est lié à la notion d’« esprit de corps ». L’armée ou les sapeurs-pompiers sont donc des lieux parfaits. D’autant que les bizuteurs présentent les « jeux » et les « défis » comme des épreuves à surmonter pour s’endurcir – exercer ou prouver sa virilité.

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Le plus surprenant : le supplice de l'eau des futurs vétos liégeois

On peut frôler la mort en buvant de l’eau - même au royaume des soirées shots et des comas éthyliques. C’est ce qu’a appris une étudiante française lors du week-end d’intégration avec de la fac dentaire de Liège. En 2013, la jeune femme a refusé de se soumettre à la règle du « baptême » : écluser des pintes jusqu’à épuisement. Mais pour ne pas risquer l’exclusion sociale, elle a accepté de jouer le jeu en remplaçant la bière par de l’eau. Or, avaler entre dix et vingt litres d’eau, c’est suffisant pour faire un œdème cérébral et frôler la mort.

L’avis de Jean-Claude Delarue : Cette histoire reflète bien toute la difficulté à se sortir de l’engrenage du bizutage. Même si elles ne sont pas d’accord pour jouer, les victimes ont tendance à accepter par peur de se retrouver sur la touche. C’est là que s’ouvre une brèche. Quand vous commencez à obéir une fois, il devient beaucoup plus difficile de se rebeller la fois suivante. C’est une fabrique du consentement perverse.

Le plus humiliant : la pâtée pour chats des prépas parisiennes

Les classes prépas ont longtemps été les plus inventives en matière de bizutage. Sollen Colléter a tiré un livre de son passage dans l’une d’entre elles. Les yeux bandés, elle a été menée jusqu’à une pièce sombre où les élèves plus âgés l’ont forcé à marcher à quatre pattes, puis lui ont frotté un poisson mort sur le visage et le corps. Une semaine durant, le « rituel » se poursuivra, offrant à l’auteure toute une gamme d’humiliations, allant de l’injonction à manger de la pâtée pour chat à celle de simuler un acte sexuel… La grande classe. L’avis de Jean-Claude Delarue : Cet exemple montre bien que le bizutage a un rôle politique de soumission des corps et des esprits. Il apprend à obéir pour les victimes, et à commander pour les bourreaux. Clairement, il sert de répétition générale avant l’entrée dans le monde du travail.