Le médecin français qui veut changer notre vision de la mort
L'Ascension des Élus, Jérôme Bosch (vers 1490). Crédit : Wikimedia Commons

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Le médecin français qui veut changer notre vision de la mort

Médecin anesthésiste-réanimateur et spécialiste des expériences de mort imminente, le Dr. Jean-Jacques Charbonier entend bien prouver qu'il existe une vie après la mort.

Médecin anesthésiste-réanimateur dans la région de Toulouse, le docteur Jean-Jacques Charbonier se décrit lui-même comme un « professionnel averti des NDE » ou expériences de mort imminente – ces expériences spirituelles vécues par des patients en état de mort clinique ou plongés dans des états de conscience altérée. Plus de vingt années de recherches dans ce domaine ont permis au docteur Charbonier d'affirmer qu'il existait une vie après la mort. S'il n'hésite pas à aller à contre-courant de la médecine occidentale, qui suit une tradition matérialiste, c'est bien parce que ses propres expériences et ses recherches l'ont convaincu que la vie n'est que le préambule de quelque chose de plus grand.

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Son approche scientifique, dans laquelle il intègre parfois des éléments de champs parallèles à la médecine – comme la médiumnité ou l'hypnothérapie, par exemple – pourrait contribuer à modifier la vision de l'être humain, de la conscience et de la mort dans nos sociétés. En plus des nombreuses conférences auxquelles il participe et des livres qu'il publie sur la mort et l'après vie, il anime aussi des ateliers d'hypnose pour rentrer en contact avec les défunts. On a discuté avec le docteur Charbonier, afin de savoir ce qui nous attendait dans l'au-delà et pourquoi la communauté scientifique n'était pas encore tout à fait prête à entendre ses propos.

Le docteur Charbonier.

MOTHERBOARD : Vous êtes médecin anesthésiste-réanimateur et vous faites des recherches sur les expériences de mort imminente (EMI). Vous soutenez notamment l'hypothèse qu'il existe une vie après la mort. Pourquoi vous êtes-vous lancé dans cette voie ?

Jean-Jacques Charbonier : Je me suis lancé dans cette voie après avoir vécu une expérience personnelle sans laquelle j'aurais poursuivi une carrière de médecin généraliste. À la fin de mes études, j'étais bien « formaté » pour penser que nous avions un cerveau qui fabriquait la conscience et que, lorsqu'il s'arrêtait de fonctionner, il n'y avait plus rien. Puis, j'ai eu ce que le Dr Moody [pionnier des recherches sur les EMI] appelle une expérience de mort partagée.

Lors d'un stage en SAMU, j'ai été dépêché sur les lieux d'un accident grave. Il y avait deux cadavres couverts d'un drap sur le bord de la route et une voiture dans le fossé. Dans cette voiture, un jeune homme était resté coincé jusqu'à la partie inférieure du thorax. Il perdait beaucoup de sang. Je devais le perfuser avant que son cœur ne s'arrête. Du fait de mon incompétence, je n'ai pas réussi et il est mort sous mes yeux. J'ai vu la mort s'installer dans son regard : sa pupille s'est dilatée et l'étincelle de vie s'en est allée. Mais surtout, j'ai senti une présence vivante et joyeuse qui sortait par le haut de son crâne. C'était comme une libération. Tout était très net pour moi. C'est là que j'ai compris que nous ne sommes rien d'autre qu'un esprit dans un corps. Je me suis souvenu du livre de Moody où les « expérienceurs » racontent être sortis de leur corps par le haut de leur crâne.

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Ça a été tellement fort que je suis rentré chez moi et j'ai tout raconté à ma femme. Je lui ai dit qu'il fallait absolument que je continue mes études pour m'orienter vers la réanimation et l'anesthésie – ce qui, en plus de représenter un lourd investissement financier, représentait trois années d'études supplémentaires. Pourtant, notre vie était organisée ; je devais racheter la clientèle d'un médecin généraliste et ma femme avait arrêté son travail pour devenir ma secrétaire.

En quoi consistent vos recherches aujourd'hui ?

Je suis anesthésiste-réanimateur. Je collecte de plus en plus de témoignages à partir desquels j'ai pu tirer un certain nombre de conclusions sur le fonctionnement de la conscience. J'ai dirigé plusieurs thèses de doctorats en médecine. La dernière a été soutenue à Reims en décembre par François Lallier. Elle se base sur les témoignages d'EMI de 118 patients et émet l'hypothèse que nous avons une conscience délocalisée – c'est-à-dire que notre cerveau ne serait qu'un émetteur-récepteur de l'information et que lorsqu'il s'arrête de fonctionner, l'information continue de circuler ailleurs. J'ai trouvé ça assez fort de suggérer l'existence d'une conscience intuitive extraneuronale délocalisée dans une thèse de médecine. Remplacez cette terminologie par le mot esprit et cela signifie la même chose. Cette thèse a été récompensée par la mention très honorable du jury et fait l'objet d'une publication internationale sur le point d'être publiée.

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"Les preuves scientifiques sont là. Mais nous sommes tellement intoxiqués par la pensée matérialiste que l'on prend pour acquis le fait qu'il n'y a rien après la mort."

Parmi les témoignages d'EMI que vous avez recensés, lesquels vous ont le plus marqué ?

Ceux qui m'ont le plus marqué restent ceux que l'on trouve dans la littérature. Il y a le témoignage d'Eben Alexander, qui est l'un des plus émouvants et dont parle le Dr Moody dans son livre. Alexander est professeur de neurochirurgie à Harvard. C'est un matérialiste pur et dur. Pour lui, les expériences de mort imminente n'étaient que des hallucinations dues à un manque d'oxygène, jusqu'à ce qu'il vive l'expérience lui-même un beau jour et fasse une méningoencéphalite et passe plusieurs jours dans le coma. Il est revenu indemne de son épisode, qu'il appellera « une incursion dans l'au-delà ». Lors de ce voyage, il était accompagné par une jeune fille « au visage souriant et charmant » qu'il ne connaissait absolument pas.

Deux mois après son rétablissement, il a vu cette jeune fille sur une photo alors qu'il était à la recherche de ses parents biologiques – qu'il ne connaissait pas. Il se trouve que cette personne qui l'a accompagné dans l'au-delà, c'était sa sœur biologique, décédée plusieurs années auparavant. Son image n'était pas stockée dans son cerveau puisqu'il ne la connaissait pas au moment de l'expérience. Raymond Moody dit lui-même, après avoir étudié le sujet pendant une quarantaine d'années, que c'est l'expérience la plus forte qui lui ait été donnée à étudier. Ils ont publié un livre ensemble, « L'évidence de l'après vie», que j'ai eu le bonheur de préfacer, à leur demande.

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C'est vrai que c'est assez déroutant. Une autre vous vient à l'esprit ?

Il y a aussi l'expérience de Pamela Reynolds. C'est une femme qui a été opérée du cerveau pour retirer un anévrisme du tronc cérébral. On lui a interrompu la circulation sanguine pendant plus d'une heure en lui refroidissant le cerveau à 15,5 degrés. À cette température, il n'y a plus aucune possibilité d'avoir le moindre échange biochimique entre deux neurones. Autant dire qu'on était sûrs d'avoir un état de mort clinique documentée. Pourtant, à son réveil, elle a été capable de décrire toute l'opération. Elle raconte avoir été au plafond, vu les instruments utilisés et entendu les discussions entre le chirurgien et le cardiologue. Tout a été détaillé. Ce qui est fascinant, c'est que tout ce qu'elle a vécu s'était bien produit.

Sur votre site Internet, il est écrit que vous avez déjà pratiqué la réanimation sur des patients en état de mort clinique. Typiquement, comment se déroule une intervention ?

Ce sont tout simplement des massages cardiaques. Quand un patient est en état d'arrêt cardiaque, il faut savoir qu'au bout de 15 secondes, il est en état de mort clinique, c'est-à-dire qu'on n'a plus d'activité cérébrale décelable au niveau cortical. On pratique alors des gestes de réanimation : massage cardiaque, ventilation contrôlée et choc électrique externe jusqu'à ce que le coeur reparte – ce qui parfois n'arrive pas.

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Dans 18 % des réanimations, les gens disent avoir vécu une expérience de mort imminente. Melvin Morse, qui a étudié cela chez les plus jeunes, trouve 65 % de récits chez les enfants victimes d'arrêt cardiaque. C'est beaucoup plus que chez les adultes. C'est simplement dû au fait que les enfants ne censurent pas leur vécu par ce que j'appelle « la conscience analytique ». Cette dernière censure toutes les informations. Quand vous êtes réveillé, elle fonctionne à plein régime. On rêve toutes les nuits et, pourtant, on ne se souvient que très rarement du contenu de nos rêves au réveil : c'est parce que notre conscience analytique se met en route. Chez les comateux, on a 5 % d'EMI et 1 % seulement chez les gens sous anesthésie générale.

Quelles sont les preuves scientifiques d'une « vie après la vie » ?

Lorsque l'on est dans un état de mort clinique – lors d'un arrêt cardiaque – normalement, l'activité cérébrale s'arrête au bout de 15 secondes et il est impossible d'avoir une fonction cérébrale ; à savoir, de voir ce qui se passe autour de nous, de pouvoir entendre et de pouvoir sentir. Autrement dit, les possibilités sensorielles sont égales à zéro, car le cerveau ne peut plus rien analyser. Pourtant, des gens sont capables de nous raconter les gestes de réanimation ; de nous raconter ce qui s'est passé dans un autre bloc opératoire ou dans une salle d'attente à distance de leur corps physique. C'est bien la preuve que nous sommes capables d'avoir des perceptions autrement que par notre cerveau. C'est, pour moi, l'une des preuves qu'il existe bien une forme de vie après la mort.

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On a sous la main aujourd'hui un certain nombre de cas probants, donc les preuves scientifiques sont là. Mais nous sommes tellement intoxiqués par la pensée matérialiste que l'on prend pour acquis le fait qu'il n'y a rien après la mort. On est désormais capable de ramener des patients de la mort grâce à la réanimation, ce qui est nouveau et révolutionnaire. Ça a du mal à passer. Des médecins vous diront même qu'on ne revient pas de la mort : quand on est mort, on est mort. Fini.

Justement, pourquoi la communauté scientifique a-t-elle du mal à accepter l'idée de vie après la mort ?

Cette idée bouleverse toute la mobilisation scientifique qui repose sur le matérialisme. Pour les scientifiques, l'être humain n'est que de la matière. Il n'y a pas d'autres possibilités. On me l'a appris pendant toutes mes études médicales en me disant que le cerveau était un organe qui fabriquait de la conscience au même titre que le foie fabrique de la bile et la thyroïde fabrique des hormones thyroïdiennes. Selon la théorie matérialiste, lorsque le cerveau s'arrête, il n'y a plus rien.

Il existe beaucoup de choses reliées à la conscience extraneuronale, en plus de l'intuition, la prémonition, l'inspiration artistique, la télépathie ou encore la médiumnité. Toutes ces choses sont niées par la communauté médicale puisqu'elles ne peuvent pas être expliquées par la théorie matérialiste. C'est pour cela que tout un tas de scientifiques ne veulent pas entendre parler de ces expériences « dérangeantes ». On ne peut plus faire l'omerta là-dessus et nier toutes ces choses. Il y aurait, d'après les estimations, 60 millions « d'expérienceurs »et de témoignages dans le monde : c'est énorme. Parmi eux, il y aurait 2,5 millions de Français, soit 4 % de la population. On ne peut pas faire l'impasse.

La pensée matérialiste va-t-elle disparaître ?

Elle va voler en éclats. On ne peut plus dire que le cerveau fabrique de la conscience, puisque l'on a une conscience encore plus performante lorsque notre cerveau ne fonctionne plus. Je fais moi-même un certain nombre de recherches là-dessus, puisqu'il ne suffit pas de collecter les résultats. Mon hypothèse est que dès lors que notre cerveau s'éteint, on a une expansion de conscience. J'ai fait un certain nombre d'expérimentations avec cette théorie. Par exemple, j'ai fait venir des médiums en réanimation pour voir s'ils ressentaient et percevaient des informations de la part des comateux. Je fais aussi des ateliers d'hypnose – on emploie parfois l'hypnose en anesthésie pour opérer sans produits – pour faire vivre des expériences de sortie de corps. Je suis souvent surpris par les résultats : les gens disent avoir été en contact avec des défunts dans 65 % des cas.

Il y a de quoi développer des recherches. On pourrait imaginer mettre trois médiums qui ne se connaissent pas et ne communiquent pas ensemble dans la même pièce avec un comateux et leur demander de fournir des résultats pour comparer. Il ne faut pas tourner le dos à des choses simplement parce qu'elles nous paraissent trop farfelues ou sulfureuses pour être vraies. Je pense que la médecine gagnerait à faire des liens avec des gens qui font de la médecine parallèle en complémentarité.

Merci, Jean-Jacques.