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chronique

Richard Bergeron est dur à suivre et c’est gênant pour lui

« Si c’est trop compliqué, mon affaire, j’irai vendre du tapis. »
Crédit photo : La Presse canadienne/Mario Beauregard

Il y a un malaise politique qui flotte sur la métropole depuis l’élection de dimanche, et ce malaise a un nom : Richard Bergeron.

M. Bergeron a perdu contre Projet Montréal, le parti qu’il a fondé puis abandonné. Une décision stratégique qu’il avait prise pour goûter, une fois dans sa vie, au pouvoir et à la possibilité d’accomplir sa vision pour Montréal.

Transfuge, il a perdu alors qu’il se présentait au poste de conseiller de ville dans l’arrondissement de Ville-Marie aux côtés de Denis Coderre. Une ballade au centre-ville était l’occasion parfaite de voir un peu partout leurs deux sourires, côte à côte, immortalisés sur du polypropylène ondulé.

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C’est un peu l’équivalent d’être en file à l’épicerie et de changer de caisse pour aller plus vite pour que, finalement, quand ton tour arrive, la caisse ferme. T’as l’air bête. M. Bergeron se retrouve aujourd’hui pris au dépourvu avec ses bananes municipales et sa boîte de Froot Loops politique dans son petit panier, et la seule caisse encore ouverte, c’est celle de Projet Montréal.

Il ne veut pas s’avouer vaincu. La défaite passée, c’est un tout autre homme qui se présente à nous. D’abord, dans sa bio Twitter, il a abandonné toute référence à son passage à l’Équipe Coderre. Il est désormais « Toujours au service de Montréal. Fondateur de Projet Montréal, auteur et urbaniste ».

Il est même allé jusqu’à dire à l’émission radio de Bernard Drainville que la victoire de Projet Montréal était un peu sa victoire à lui. Et qu’il avait prié le ciel pour perdre, pour que son ancien parti l’emporte.

M. Bergeron laisse la campagne électorale pour la campagne de séduction : il veut regagner la confiance de Projet Montréal. Maintenant qu’il a perdu, et que Denis a perdu, il veut revenir à ses premières amours. Et une job.

« Comme beaucoup de gens qui ont perdu leur élection, je suis à la recherche d’un emploi », a-t-il admis mercredi, questionné par Bernard Drainville. Il l’a répété au 15-18 hier à Radio-Canada. Puis aujourd’hui, à Gravel le matin.

Dans ces trois entrevues, il n’a pas tari d’éloges pour la toute première mairesse de Montréal. « Wow! Quelle performance! » s’est-il exclamé avec un enthousiasme appuyé. Valérie Plante est une femme qu’il dit admirer et à qui il aurait « dit des bons mots dans le creux de l’oreille » lorsqu’il l’a croisée durant la campagne.

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Passons sur la légère chair de poule que me donne cette image. Valérie Plante n’a pas l’air tout à fait sûre de ce qu’elle doit faire de ces éloges et cette offre de services. « En termes de besoins immédiats, c’est non », a-t-elle indiqué prudemment mercredi, en entrevue avec Métro.

On peut comprendre l’hésitation. Le changement de formation politique n’inspire pas exactement confiance. Le nouveau président du comité exécutif de la Ville, Benoit Dorais, ne s’est pas gêné pour rire de la situation sur Twitter.

Pour la petite histoire, Richard Bergeron a fondé Projet Montréal en 2004 et en a été le chef à trois élections. Trois scrutins auxquels il a terminé troisième; la dernière fois, en 2013, il était derrière Denis Coderre et la nouvelle arrivée en politique, Mélanie Joly.

Si Mme Joly n’a pas respecté sa parole – elle assurait être en politique municipale pour y rester – elle a su décrocher deux ans plus tard le prestigieux poste de ministre du Patrimoine au sein du gouvernement fédéral.

Avec Richard Bergeron, c’est plutôt la mâchoire des citoyens incrédules devant sa récente volte-face qui s’est décrochée.

Il est difficile à suivre. Il a d’abord annoncé qu’il quittait la vie politique en 2013, la mort dans l’âme, réalisant qu’il ne serait jamais élu. Il est passé l’année suivante au conseil exécutif de Denis Coderre, pour ensuite faire campagne à ses côtés, contre Projet Montréal.

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Trois jours avant le scrutin de dimanche, M. Bergeron a attaqué son ancien parti de front, disant que depuis l’arrivée de Valérie Plante, Projet Montréal était un parti « radical » et « d’extrême gauche ».

Quand M. Drainville lui a rappelé cette sortie virulente, il a ri, d’un rire peu naturel. Comme s’il s’efforçait de rire de sa bonne blague. Il a dit que ça faisait partie de la game et qu’il s’inquiétait surtout pour le développement du centre-ville.

Au 15-18, il a assuré qu’en politique, il est « normal qu’on se donne des coups de pieds dans les tibias. Pis si on n’est pas capable de prendre ces jeux-là, on n’a pas d’affaire en politique. » Je n’ai jamais essayé de kicker mon ex dans les tibias avant de le supplier de me reprendre. Peut-être que ça marche.

À l’émission d’Alain Gravel, il s’est justifié en parlant d’un « minimum syndical » à faire pour sa campagne.

- Vous ne croyiez pas ce que vous disiez?
- Ben non! Mais… c’est ewhweir sssssf effhshs.. J’ai plein d’amis dans Projet Montréal! s’est habilement défendu Bergeron.

M. Gravel a souligné que, s’il ne fallait pas croire les attaques de M. Bergeron trois jours avant la campagne, comment pourrait-on croire ce qu’il dit maintenant? « Si c’est trop compliqué, mon affaire, j’irai vendre du tapis ou je ferai quelque chose dans ce genre-là », a-t-il laissé tomber.