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Les vaches qui côtoient les humains sont plus bêtes que les autres

La taille du cerveau des bovins varierait selon leur degré d'interaction avec les éleveurs.
Alexis Ferenczi
Paris, FR
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La célèbre Craven Heifer peinte en 1811.  Pictures Now / Alamy Stock Photo

Au XVIIIe siècle en Angleterre, les propriétaires de bovins sont pris d’une forme de gigantisme. En gavant leurs animaux et en pratiquant un élevage sélectif, certains obtiennent des vaches aux dimensions colossales qu’ils s’empressent d’immortaliser en tableaux. Le geste est vu à l’époque comme patriotique, plus l’animal et gros, plus il pourra nourrir de monde. Quelques spécimens acquièrent même une petite célébrité comme le taureau de Durham ou la Craven Heifer, bêtes de foire qui attirent dans leur sillage bon nombre de curieux. Ce que les éleveurs ne savent peut-être pas, c’est que, le cerveau de l’animal n’est pas proportionnel à sa taille.

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C’est un fait que les scientifiques ont observé depuis belle lurette. Les animaux domestiques, moutons, cochons, chats et chiens, ont des plus petits cerveaux que leurs homologues à l’état sauvage – un des traits du « syndrome de domestication ». Un phénomène qui n’avait pas été formellement identifié pour les bovins, puisque leur ancêtre sauvage est éteint depuis plusieurs centaines d’années, mais qu’une récente étude menée par Ana Balcarcel, chercheuse à l’université de Zurich, et relayée par le site New Scientist, vient confirmer. Balcarcel va même un peu plus loin ; au sein des espèces bovines domestiquées, les animaux qui ont plus d’interactions avec les humains ont des plus petits cerveaux que ceux qui vivent de manière plus émancipée.

« L’intensité du contact a un effet sur la taille du cerveau »

Pour arriver à cette conclusion, Balcarcel a mesuré pas mal de crânes. Celui d’un animal sauvage aujourd’hui disparu, l’auroch (bos primigenius), l’ancêtre probable de nos vaches qui faisait partie il y a 10 000 ans d’une première vague de domestication au Moyen-Orient incluant cochons, moutons et chèvres,  rappelle Science Mag, et ceux de 71 races de bovin domestiqués (bos taurus). Résultat du test comparatif : les cerveaux du bétail domestiqué seraient 26 % plus petit que celui du bétail sauvage.

« Le résultat le plus surprenant,  c’est quand on a commencé à comparer la taille des crânes au sein même des différentes populations domestiquées. Là aussi on a trouvé des différences marquantes », confie Balcarcel dans des propos rapportés par le New Scientist. « Surtout, ces différences ont un fort corrélat avec le temps passé par ses animaux avec les humains. L’intensité du contact a un effet sur la taille du cerveau ». L’équipe a observé que certaines races qui fréquentent assidûment les éleveurs – comme les vaches laitières – ont des plus petits cerveaux que les bovins plus indépendants qui n’ont qu’un contact limité avec les humains, comme les taureaux de combat dont le cerveau, par la taille, se rapproche de celui de leurs ancêtres.

Comment expliquer cette hétérogénéité ? Balcarcel avance l’hypothèse d’un mécanisme commencé dès les premiers sujets domestiqués. « À l’origine, les animaux capturés par les humains sont ceux qui étaient moins agressifs, le processus a simplement été accentué. » Comprendre, la sélection génétique opérée par les éleveurs a considérablement réduit chez la vache laitière les parties du cerveau dédiées à la peur, l’anxiété et l’agressivité. Des changements que la chercheuse estime particulièrement rapide puisque les races de bovins observées ont à peine 200 ans.

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